Les avis de - Stupor Mundi

Après avoir délivré sa femme Aaricia des griffes des Bienveillants (les mal nommés), Thorgal s'installe avec cette dernière -- enceinte -- dans un village de paysans. Hélas, la tranquillité de nos héros sera troublée par une crise d'adolescence, un prince obèse sadique et un héritier fugitif...

Par rapport à l'album précédent et, surtout, au suivant, "La galère noire" peut sembler un peu faible. Les péripéties sont en effet un peu forcées, et l'histoire manque parfois de vraisemblance. Pourtant, l'album reste bon dans l'ensemble, et sa noirceur achève d'établir le ton de la série. (De toute façon, si vous voulez goûter pleinement au merveilleux "Au-delà des ombres", il faudra le lire... Pas le choix !)

Remarque à "pierryves" : Brek Zarith est un royaume imaginaire situé quelque part entre les Îles britanniques et la Scandinavie. Son avancée technologique par rapport aux pays voisins s'explique manifestement par la conservation des sciences antiques, ou par une influence byzantine. Il ne faut pas oublier que les puissances européennes n'ont jamais cessé d'utiliser des galères... La présence d'une galère de ce style ne me choque donc pas de prime abord. Quid de l'œil peint sur la proue ? (Car c'est bien cela qui vous gène n'est-ce pas ?) Eh bien ! il s'agit d'heroic fantasy, ne l'oubliez pas...

Pour sauver son épouse mourante, Thorgal devra aller là où aucun mortel n'est allé : "au-delà des ombres"... Mais pourra-t-il payer le prix que réclameront les forces dont dépend le sort d'Aaricia ?

Tout a déjà été dit. Un magnifique album. Du grand 9e art. L'album à lire en premier si l'on ne connaît pas encore la série.

Lors d’une escapade en [Grande-]Bretagne, Thorgal se voit, par la force des événements, entraîné dans un tournoi d’archerie.

Ce qui fascine dans "Les Archers", ce n’est pas tant l’histoire, du ressort du film d’aventures, et finalement moins originale que celle des albums précédents, que l’habileté scénaristique de Van Hamme. Comme dans la plupart des Thorgal "classiques" (grosso modo jusqu’au cycle de Shaïgann), le découpage est cinématographique. Les scènes se suivent sans le moindre temps mort, et l’on est gratifié d’une introduction qui trouvera son épilogue dans la séquence finale. En y repensant, je crois que c’est cette supériorité radicale dans la construction d’un album qui m’a le plus charmé dans les "vieux" Thorgal, et c’est son absence qui m’a le plus rebuté dans les albums plus récents.

Un exemple de cette maestria est l’usage de la pierre de sang comme fil rouge scénaristique. La pierre de sang apparaît dans l’introduction ; sa récupération par ses propriétaires légitimes clôture l’album. Mais c’est lorsque Tjall la voit autour du cou d’un brigand qu’elle amène les événements qui rendront possible la collaboration entre Thorgal et Kriss de Valnor (et donc l’histoire !).

Car les auteurs introduisent un personnage majeur de la série : la redoutable Kriss de Valnor. Ceux qui trouvent le personnage excessif ont peut-être raison… Pourtant, elle n’est pas sans ambiguïté car la fascination érotique mutuelle entre elle et Thorgal se dessine déjà…

Van Hamme est à l’aise avec ses personnages. Il développe la personnalité foncièrement positive de Thorgal, mais aussi son côté anarchiste et individualiste, ce qui en fait un personnage nettement plus humain que le héros de base de la BD pour ados. Thorgal n’est pas un héros au grand cœur, il n’est pas non plus un redresseur de torts, et s’il enterre ses victimes et méprise suffisamment l’argent pour le laisser aux Calédoniens, il ne risquera pas sa vie pour un individu qui ne lui est rien. Il peut même parfois se révéler obtus. C’est un homme pieux, au sens antique du terme. Un païen adepte d’une morale naturelle. Dans le développement du personnage, Van Hamme fait donc mouche en évitant tout anachronisme moral.

Un must de la BD, à mon humble avis… Et qui introduit mon cycle préféré de la série : le cycle du Pays Qâ.