Cher lecteur de BDGest

Vous utilisez « Adblock » ou un autre logiciel qui bloque les zones publicitaires. Ces emplacements publicitaires sont une source de revenus indispensable à l'activité de notre site.

Depuis la création des site bdgest.com et bedetheque.com, nous nous sommes fait une règle de refuser tous les formats publicitaires dits "intrusifs". Notre conviction est qu'une publicité de qualité et bien intégrée dans le design du site sera beaucoup mieux perçue par nos visiteurs.

Pour continuer à apprécier notre contenu tout en gardant une bonne expérience de lecture, nous vous proposons soit :


  • de validez dans votre logiciel Adblock votre acceptation de la visibilité des publicités sur nos sites.
    Depuis la barre des modules vous pouvez désactiver AdBlock pour les domaine "bdgest.com" et "bedetheque.com".

  • d'acquérir une licence BDGest.
    En plus de vous permettre l'accès au logiciel BDGest\' Online pour gérer votre collection de bande dessinées, cette licence vous permet de naviguer sur le site sans aucune publicité.


Merci pour votre compréhension et soutien,
L'équipe BDGest
Titre Fenetre
Contenu Fenetre
Connexion
  • Se souvenir de moi
J'ai oublié mon mot de passe
AD

Les avis de - Yovo

Visualiser les 550 avis postés dans la bedetheque
    Yovo Le 24/01/2022 à 22:21:28
    47 cordes - Tome 1 - Première partie

    Il est extrêmement rare que j'achète une BD sans en aimer le dessin. C'est pourtant ce que j'ai fait avec "47 cordes".
    Je l'ai fait car je sais que Timothé Le Boucher écrit ses histoires avec une grande finesse. Elles distillent une étrangeté très particulière, un parfum d'inquiétude que j'apprécie beaucoup. Il accorde également une importance majeure à la psychologie de ses personnages et sait jouer de mille petites subtilités pour affiner leurs caractères. En un mot, c'est un grand scénariste.

    Il est sans doute aussi un grand dessinateur mais je ne parviens pas à apprécier son trait à sa juste valeur, question de style. Il est beaucoup trop aseptisé pour moi.
    Je reconnais toutefois qu'il arrive à insuffler de la vie et du mouvement à ses acteurs grâce à un équilibre harmonieux des corps, des positions justes, un design impeccable et des cadrages élaborés. Je n'y suis pas sensible mais c'est un travail graphique remarquable.

    Tout ça pour dire que "47 cordes" coche toutes les cases. C'est une œuvre impressionnante et réussie à tous points de vue. En tout cas dans le registre visé, à savoir le conte fantastique, ça fonctionne à la perfection.

    Il y quelque chose de très théâtral dans tout ça mais ce n'est pas un défaut, bien au contraire. C'est justement ce qu'il fallait dans ce contexte de faux-semblants, de polymorphisme et de métamorphoses. Plus d'action ou plus de réalisme aurait ruiné cette élégance froide et raffinée, parfaitement adaptée aux décors quasi surnaturels, trop luxueux pour ne pas être suspects. Et c'est cet aspect qui provoque la dimension hypnotique et obsédante indispensable à la trame. Entre illusions et fantasmes, une atmosphère vénéneuse se répand dans ce qui devient peu à peu une scène où se jouent les destins.

    Cet univers artificiel, incertain, vaguement décadent est le terrain de jeu de la métamorphe, une insaisissable créature qui a jeté son dévolu sur Ambroise, le héros qu'a choisi l'auteur pour lui servir de proie. Je le trouve assez terne et peu attachant mais par effet de contraste, il fait de la métamorphe la véritable héroïne du récit - et une grande héroïne tout court - que j'ai vraiment appris à aimer au fil des pages. Malgré son charisme magnétique, ses pouvoirs de déesse et sa dangerosité, elle est pénétrée par une forme de vulnérabilité qui la rend magnifique.

    En conclusion, 47 cordes possède ce qu'il manque trop souvent aux autres productions : l'ambition.
    Timothé Le Boucher se donne les moyens d'explorer l'univers qu'il imagine dans les moindres recoins, de le faire exister en prenant tout son temps pour y installer un climat de tension fascinant, y faire planer une menace indistincte sur des êtres devenus objets d'enjeux qui les dépassent. Tout cela fait sens et réussit immanquablement à interpeller le lecteur.

    Cet album est captivant, solide et réalisé avec grand talent.
    La barre est haute... Si la deuxième partie se maintient à ce niveau, le 9ème art aura gagné une nouvelle référence.

    Yovo Le 23/01/2022 à 11:39:22
    L'Âge d'eau - Tome 1 - Première partie

    Dans un présent alternatif, une partie de la France est sous les eaux.
    Le pays se réorganise tant bien que mal en se calfeutrant derrière des digues. Mais nombreux sont ceux qui veulent échapper à ce nouvel ordre sécuritaire et rapiécé en partant vivre au gré des flots. Cependant, leur mode de vie libertaire et autarcique n'est pas du goût des autorités qui vont rapidement l'interdire et les traquer...

    J'adore ce scenario, aussi propice à l'imaginaire qu'à la réflexion.
    La couverture, superbe, est déjà une invitation à l'évasion !

    A l'intérieur, Benjamin Flao alterne les planches pleine pages hyper réalistes faites au pinceau avec ce dessin crayonné, vibrant et expressif, si caractéristique de son style. Le combo parfait pour créer une ambiance de délitement très immersive. Visuellement il s'en dégage une force évidente et une sensation de liberté sauvage.

    Pourtant, loin d'une vision post apocalyptique anxiogène, l'atmosphère reste chaleureuse et poétique, presque bienveillante.
    L'histoire est d'ailleurs racontée par un chien télépathe, rêveur et contemplatif. Ce narrateur impromptu n'a rien d'un artifice. Il contribue à rendre les protagonistes encore plus humains tout en apportant une touche fantastique bien en phase avec cet univers. Grâce à ce regard animal, tout ce qui pouvait être glauque a été laissé hors-champ et l'attention est focalisée sur les personnages, particulièrement attachants et bien incarnés. L'auteur s'en approche au plus près et prend le temps de les faire dialoguer pour permettre au lecteur de mieux les connaitre.

    Le rythme, entrecoupé de silences, n'est donc pas intense mais l'action n'est pas le moteur narratif. C'est une forme de mélancolie qui fait progresser le récit à hauteur d'homme, indolemment mais sans faiblir, au milieu de décors vertigineux.

    Au bout des 156 pages, il est encore difficile de savoir où Benjamin Flao veut nous emmener. Sans doute vers une certaine idée de la liberté ? On peut le penser. Une chose est sûre, je me laisserai embarquer avec Hans et Gorza en toute confiance dans le second tome de ce diptyque.

    Un album humaniste, riche et beau, qui m'a procuré un ardent plaisir de lecture.
    Bravo et merci !

    PS. Attention, grosse faute d'orthographe page 108 : "Je ne peut..." Ouille !! A corriger impérativement dans les prochaines réimpressions...

    Yovo Le 20/01/2022 à 22:25:44

    Il suffit de feuilleter "René.e aux bois dormants" pour deviner que cet album va nous faire plonger dans l'inconnu.
    Chaque page est un nouvel univers qu'Elene Usdin réinvente sans cesse avec un langage graphique radical, peuplé d'Esprits chamarrés, de créatures inquiétantes et de fantômes. Libre et inventive, elle ne fait aucune concession à un quelconque formalisme.

    Ce voyage hallucinant où le réel n'a (presque) plus cours, saturé de couleurs, tient plus de l'art que du simple dessin. On pense à Delaunay, à Kirchner, à Bacon, au Fauvisme surtout. Et ce n'est pas qu'un vernis esthétique pour en mettre plein la vue. Cette incroyable palette est porteuse de sens et traduit magnifiquement les puissances de la Nature qui jouent ici un rôle fondamental. L'autrice en fait un poème visuel envoûtant et troublant, fortement teinté d'animisme.
    Elle s'immerge dans le ressenti et les sensations, comme emportée par des visions chamaniques qui convoquent en nous quelque chose d'archaïque, quelque chose qui n'a pas de nom. Un déferlement d'émotions crues qui noie tout besoin d'explication : "Allons ensemble nous enivrer du sensible", page 178.

    Cette forme fantasmagorique est entièrement au service du fond. Car, il y a bien sûr une finalité à ce vertige chromatique.

    On pressent dès le départ que le trame est cohérente et qu'un récit précis, puissant, se construit. Preuve de la maîtrise peu commune d'Elene Usdin : malgré de multiples digressions oniriques imbriquées les unes dans les autres, le fil n'est jamais complètement perdu.
    Je savais intuitivement en m'égarant dans ces images qu'il en ressortirait une vérité bouleversante. Mais j'ignorais laquelle.

    La quête éperdue de René.e/Judith à la poursuite de leur doudou lapin (hommage à l'Alice de Lewis Caroll) est en réalité une quête identitaire, vitale. Derrière ces métamorphoses, ces transmutations mêmes que vivent les jeunes personnages, c'est l'histoire d'un terrible drame, bien réel, qui remonte à la surface de la mémoire. Le rêve est donc ici un refuge, un mécanisme de défense que l'esprit élabore pour se protéger d'une douleur indicible.

    Cette histoire, on le comprend explicitement à la fin, est celle de la "rafle des années 60". Celle du martyr des enfants autochtones du Canada, déracinés de force, arrachés à leur culture, leurs dieux, leur langage, privés du respect ancestral que leur peuple éprouvait pour la nature.

    J'en suis ressorti sidéré, groggy.

    La question de noter une telle œuvre n'a d'ailleurs pas beaucoup de sens. C'est une expérience plus qu'une lecture.
    Je mets évidemment 5 étoiles pour l'impact et la beauté du dessin, la leçon de bande dessinée, la symbolique, la profondeur du propos... Mais d'autres pourraient n'en mettre qu'une, voire aucune. C'est tout à fait insignifiant.

    C'est un livre important, hors norme, qu'il faut lire absolument, quitte à ne pas tout saisir.
    Magistral !

    Yovo Le 16/01/2022 à 17:45:04

    Quand on feuillète l'album il n'a pas vraiment l'air sexy (j'y reviendrai). Mais derrière ces apparences un peu mornes se cache une œuvre irrésistible.

    Son scenario est impressionnant d'érudition et pétille d'énergie. Il fait du Livre, avec un grand L, le cœur battant de la connaissance et de la transmission du savoir. 'Savoir' que Lupano sacralise et érige en bien universel, en intelligence collective héritée de siècles de pensée. Il en fait surtout un étendard étincelant contre la barbarie.

    Et cette lumière pour l'humanité, il suffira de l'aveuglement d'un seul homme pour l'éteindre à jamais. C'est ce que commet, cet an de grâce 976, le puissant vizir de Cordoue en livrant aux flammes la plus prodigieuse bibliothèque de son temps.

    Pour la progression de son intrigue, le scénariste va constamment jouer sur la fragilité du livre - en tant qu'objet - et créer ainsi un suspense digne des plus grands récits picaresques : un archiviste replet, une brillante copiste et un voleur minable vont risquer leurs vies pour sauver d'inestimables manuscrits du funeste autodafé et tenter de les emmener en lieu sûr.
    Les ouvrages réchappés du brasier, rudement transbahutés à dos de mule, vont alors subir tous les outrages au fil d'un trépidant périple tragi-comique. Cette équipée est si piteuse qu'elle en devient grandiose. A l'image de ce récit truculent remarquablement fluide.

    Les excellents personnages, vivants et parfaitement caractérisés, touchent autant par leur détermination que par leur maladresse et leur impuissance à préserver leur trésor.

    S'il s'agit d'une fable, l'auteur nous rappelle également avec force qu'elle est ancrée dans une époque lointaine mais bien réelle : celle où le monde arabo-musulman, pourvoyeur de culture, rayonnait aux portes d'une Europe encore plongée en plein obscurantisme.

    Voilà pour l'écriture inspirée d'un Wilfrid Lupano toujours très affuté.

    En revanche pour la partie graphique je serai plus mesuré. Il s'en dégage de belles ambiances et beaucoup de vivacité, c'est indéniable. Mais je ne peux pas dire avoir été transcendé par le dessin de Leonard Chemineau, tantôt très caricatural ou crayonné, tantôt réaliste et précis. Sans démériter, ce style incertain m'a semblé bizarre et moins abouti que sur le très réussi "Edmond", par exemple. Mais je salue bien sûr son énorme travail sur ce titre.

    La faute également à une qualité d'impression moyenne, et là, je ne rejoins pas du tout les autres commentaires. C'est pour moi une vraie déception de la part de Dargaud, d'habitude irréprochable. Peut-être ne s'agit-il que d'un défaut de mon exemplaire mais le trait manque singulièrement de netteté. Par ailleurs, les couleurs sont belles mais ternes et de nombreux grains et autres impuretés viennent trop souvent salir les aplats, surtout les jaunes. C'est vraiment dommage.

    Pour un album qui fait du livre son sujet, l'ensemble du travail éditorial aurait pu d'ailleurs être encore plus soigné. Le signet et la tranche des pages bleue sont sympa, certes, mais le reste ? Au hasard, un papier de meilleure qualité, un dos toilé, un titre embossé ou un simple vernis sélectif aurait eu plus d'allure, surtout à ce prix-là (35€, imprimé en Italie !..)
    A titre d'exemple, je viens d'acheter "René.e aux bois dormants" chez Sarbacane, à la pagination comparable mais d'un format beaucoup plus grand, avec un papier plus épais, chatoyant de couleurs impeccables, pour moins cher (32€, imprimé en France...)

    Mais mis à part ces bémols qui ne feront sûrement grommeler que moi, je ne peux que recommander cette Bibliomule, une excellente BD pleine d'émotion, d'enseignement et de sagesse. A lire absolument !

    Yovo Le 08/01/2022 à 13:08:46
    La venin - Tome 1 - Déluge de feu

    Devant l'avalanche de parutions qui submerge les étals, j'avais fait l'impasse sur La Venin lors de sa sortie, non sans avoir hésité.

    Mais quand j'ai vu que Rue de Sèvres allait ressortir chaque tome en grand format N&B (tout ce que j'aime) ce fut l'opportunité de rattraper mon retard en m'offrant le premier et je ne le regrette pas.

    "Déluge de feu" est un bon album.
    Il ne fait certes pas dans la dentelle ! Mais malgré la trame classique et les clichés, les rebondissements s'enchainent sans mollir en impulsant un rythme hyper dynamique, boostés par des cadrages très efficaces. Emily - mélange de pin-up badass et d'ange de la mort - en devient une héroïne attachante et suivre sa cavale, aussi invraisemblable soit-elle, est un vrai plaisir.

    Du coup, je suis bien content de découvrir enfin la série dans cette belle édition, écrin idéal au dessin bien typé de L. Astier.

    Yovo Le 07/01/2022 à 21:21:06
    Astérix - Tome 39 - Astérix et le Griffon

    Ouais ouais ouais... Il ne faut quand même pas être exigeant pour trouver cet album excellent.

    Pour ma part, ce furent 20 mn de lecture sympa, sans plus. Dès les premières pages j'y ai vu des défauts qui ne m'ont pas lâché jusqu'à la fin. Le principal d'entre eux est qu'il n'y a aucun enjeu à cette histoire, totalement anecdotique, presque inutile. En fait, les Sarmates se débrouillent très bien toutes seules et n'ont nul besoin de nos gaulois qui, du coup, ne servent à rien. Tout comme César n'a nul besoin d'un griffon.

    Sur la forme j'ai trouvé l'ensemble peu drôle, et malgré de bonnes situations, les dialogues sont rendus artificiels par des kyrielles de jeux de mots lassants à longueur de bulles qui m'ont provoqué plus de soupirs que de sourires.
    Mais bon, par respect pour les auteurs qui ont fourni un travail honorable, je ne vais pas me répandre en critiques.

    Pour les qualités : l'originalité des décors, les nombreux personnages féminins et le dessin, bien sûr, vraiment bon.
    2,5/5

    Yovo Le 31/12/2021 à 12:20:49
    Le serpent et la Lance - Tome 2 - Acte 2 - Maison-vide

    J'ai relu l'Acte 1 pour me rafraîchir la mémoire avant d'entamer "Maison-vide". Et, malgré ses qualités, c'est vrai qu'il avait une structure narrative assez complexe qui nuisait un peu au confort de lecture.

    L'auteur, décidément très pro, a parfaitement corrigé le tir.

    Ce 2ème tome est plus court, plus fluide, plus rythmé. Les flashbacks sont encore très nombreux mais ils éclaircissent le récit et donnent à voir les personnages sous un jour inattendus. L'atmosphère de thriller se renforce et la tension s'installe. C'est du très beau travail.

    Lire "Le Serpent et la Lance", c'est se plonger dans une époque et des décors complètement inédits en BD, écrits et dessinés avec grand soin. Mille mercis à Hub d'avoir créé cette aventure avec autant d'intégrité et de passion. Je trépigne d'en connaitre la suite, bravo !

    Yovo Le 26/12/2021 à 19:25:20
    Blake et Mortimer (Les Aventures de) - Tome 28 - Le Dernier Espadon

    Je viens de relire la toute première version du Secret de l'Espadon (voir mon avis pour ceux que ça intéresse) et qu'on aime ou pas les vieilles reliques, l'ambition, l'énergie et la tension de ce tome inaugural lui donnaient une ampleur inégalable. Franchement, je trouve que ce "Dernier Espadon" fait pâle figure à côté. J'ai vraiment du mal à comprendre qu'on puisse lui attribuer la note maximale.

    Evidemment ce n'est pas si mal non plus. Je ne suis pas un spécialiste de B&M mais l'esprit de la série est globalement respecté. L'ambiance est authentique, malgré la violence, et la ligne claire fidèle.

    En revanche le scénario est largement perfectible et n'a rien à voir avec la qualité de l'Espadon historique. Les efforts de Van Hamme pour coller à l'histoire originelle sont louables et certains passages restent efficaces. D'autres en revanche m'ont semblé faiblards.
    Quant aux deux "subterfuges" autour desquels s'articulent le récit - faible hommage au 1er opus - ils sont si prévisibles qu'on les voit venir à des kilomètres. C'est navrant, et surtout dommage, car derrière cette forme de facilité, voire de paresse scénaristique, c'est le plaisir de lecture qui s'enfuit aussi vite qu'un espadon gagnant la stratosphère...

    En résumé c'est un album correct mais que j'oublierai très rapidement.

    A titre personnel, je préfère les albums "vu par" ou les hors-série comme "Le dernier Pharaon" (même si oui, je sais...). Au moins ce ne sont pas des copies serviles qui ne tiennent jamais la comparaison avec l'original. Et les personnages existent par eux-mêmes, hors leurs créateurs; Ils n'en sont que plus vivants, intemporels et universels.

    Yovo Le 21/12/2021 à 20:23:21
    The kong Crew - Tome 2 - Hudson Megalodon

    "Hudson Megalodon" confirme toutes les bonnes intentions qu'avaient affiché d'entrée "Manhattan Jungle".

    Il se déroule dans une ambiance assez hollywoodienne et décomplexée, avec de l'action en Cinémascope et des rebondissements en cascades. Les personnages surjouent largement mais leurs répliques, même les plus lourdingues, restent ultra efficaces et adaptées au cadre.
    Le clou du spectacle, lui, est assuré par les improbables dinosaures qui peuplent New York et bouffent tout ce qui leur tombe sous les crocs, surtout si ça ressemble à un GI !
    Bref, ça peut paraitre n'importe quoi mais c'est super bien fait et ça marche à fond. Le scenario, précis et bien huilé, exploite à la perfection ce ton décalé qui permet constamment d'accrocher le lecteur avec un mélange détonnant d'humour et d'adrénaline.

    Avec son dessin qui en met plein la vue et le rythme de dingue qu'il arrive à insuffler à ses planches, Eric Hérenguel est un de ces gars qui maitrisent tous les codes de la BD populaire, auxquels il sait ajouter ce truc en plus pour en faire un succès. On peut parier que ce sera le cas pour The Kong Crew, tant on devine intuitivement que cette série jubilatoire a le potentiel d'un futur Classique.

    Yovo Le 16/12/2021 à 10:29:00
    Terre - Tome 2 - retour au Jupiter

    Ce 2ème tome est beaucoup mieux que le précédent.
    De la bonne SF à l'ancienne, un peu pépère mais dépaysante, avec des décors aussi beaux qu'efficaces et un rythme agréable. Quelques séquences marquantes viennent enrichir un scénario qui reprend du poil de la bête et annonce de belles surprises à venir.

    J'ai toujours des réserves sur les personnages, un peu statiques et insuffisamment développés à mon goût. Mais ça n'amenuise pas l'impression de qualité qui se dégage de cet album.
    J'ai pris un grand plaisir à le lire en tout cas. En bonus, la couverture est superbe !

    Yovo Le 15/12/2021 à 21:50:32
    Les 5 Terres - Tome 7 - « L'Heure du cadeau »

    Ce nouveau cycle démarre à Alysandra, la florissante capitale de Lys, Terre du peuple primate. Un univers dépaysant, semblable à la Chine, très différent de l'ambiance minérale d'Angleon.

    Autre nouveauté : l'intéressante féminisation de la société. La plupart des rôles-clés sont tenus par des femmes. Et cela semble tout à fait naturel et cohérent.

    D'autant que les dialogues sont nettement moins bavards. La bonne idée est d'avoir remplacé les manigances de cour par la chronique d'un puissant clan mafieux au leadership affaibli par des luttes intestines et des gangs rivaux...
    Plusieurs autres arcs narratifs secondaires s'entremêlent avec une belle fluidité et un découpage parfait.

    Côté dessin, c'est toujours très bon.
    Les costumes et décors, bien détaillés, apportent une crédibilité appréciable à l'ensemble.
    Les personnages sont aussi très convaincants. Les faciès simiesques étant beaucoup plus proches des visages humains que des têtes de félins. Cela les rend plus expressifs, plus incarnés et charismatiques. On reconnait chaque protagoniste immédiatement, autant par son physique que par son caractère.

    Avec ce renouvellement total des acteurs, du background et de l'action, il est juste étrange qu'il n'y ait, pour l'instant, aucun lien avec le 1er cycle. Mais cela s'annonce de bon augure. A croire que les auteurs ont pris en compte les remarques des lecteurs qui trouvaient qu'un trop-plein de discours politiques ralentissait un peu le rythme dans le cycle inaugural : le deuxième s'ouvre sur une promesse d'action tous azimuts.
    Et franchement, bravo, ça commence très très bien !

    Yovo Le 12/12/2021 à 20:35:44
    Blake et Mortimer (Les Aventures de) - Tome 1 - Le Secret de l'Espadon - Tome 1

    ::: Avis pour le tirage limité de la collection "Une histoire du journal de Tintin", noté TL2021 :::

    Superbe idée, cette édition spéciale du Secret de l'Espadon !

    Les planches originales y sont restituées tel quel avec tous leurs défauts de conception et d'impression, en plus de leurs couleurs craspouilles et fanées. On a vraiment la sensation d'avoir en main un authentique journal de Tintin de l'époque. Et ça, ça change tout. Moi qui n'aimais pas forcément Blake et Mortimer en édition normale et bien léchée, ces deux albums vintage m'ont permis de redécouvrir complètement cette œuvre fondatrice que je préfère 1000 fois comme ça. Un peu comme les épisodes noir et blanc d'une vieille série télé, on la lit à travers ce prisme historique sans la juger selon les critères actuels, au regard desquels B&M passe à mes yeux pour une série ripolinée baignant dans son conservatisme propret comme dans du formol.

    Je me dis que, même si ce premier opus à quelque chose de désuet aujourd'hui, cela a dû être fabuleux de découvrir ces héros sous cette forme - et en feuilleton - dès 1946 !
    Mais désuet ne veut pas dire périmé. Ca reste une BD solide qui m'inspire le plus grand des respects.

    Pour tous ceux qui sont attachés au côté patrimonial de la série, cette version, augmentée de nombreux documents inédits, est indispensable. Dépêchez-vous, il n'y en aura peut-être bientôt plus (6000 exemplaires).

    Yovo Le 10/12/2021 à 20:52:21

    Pour ceux qui auraient vécu au fond d'une grotte et seraient passé à côté de "Tyler Cross", la sortie de cette intégrale est inespérée, providentielle, bénite, miraculeuse... Jetez-vous dessus, une séance de rattrapage s'impose !

    J'en rajoute un peu mais je ne peux pas être objectif, Tyler Cross étant au sommet de mon panthéon personnel. Cette série déjà culte, incontournable, est simplement géniale. La lire en N&B était jusque-là un privilège rare réservé aux possesseurs des tirages limités. J'en rêvais... C'est désormais chose faite (merci Dargaud d'avoir lu dans mes pensées et exaucé mon souhait !). Ce bouquin est un bijou.

    Yovo Le 02/12/2021 à 18:05:02

    :::: Avis pour le tirage limité à 4200 exemplaires N&B (noté 'TL2' sur le site) ::::

    Cette édition est superbe. Sans doute un peu chère mais le format, déjà, est impressionnant. S'y ajoute un frontispice numéroté de Marini reprenant la couverture de l'édition classique et un cahier graphique avec des croquis de Bertail, Labiano, Blasco-Martinez, Prugne, Taduc et Toulhoat. Mais c'est surtout la qualité du papier, doux, mat et épais, qui fait une vraie différence.
    De plus, hormis les histoires de Prugne et Bertail qui restent inchangées, le passage au noir & blanc est splendide et fonctionne à 100%. Il procure un tout autre plaisir de lecture. Possédant les deux éditions, je n'ai d'ailleurs pas du tout l'impression d'un doublon.

    Comme je l'ai déjà dit, même si le rythme des différentes histoires est abrupt, un tel casting de dessinateurs fait de "Go West young man" un titre définitivement hors-norme à mes yeux qui justifie l'achat de cette édition spéciale.

    Yovo Le 29/11/2021 à 10:17:51
    Bergères Guerrières - Tome 4 - L'abîme

    "L'abîme", une conclusion généreuse et poignante qui exalte des valeurs de respect, de solidarité et de détermination face à l'ennemi. Et cet ennemi n'est pas celui qu'on croit. Ce ne sont ni les terribles animaux géants, ni la magie noire : c'est la guerre. La guerre, absurde et cruelle qui n'épargne personne et emporte ceux qu'on aime.

    Jonathan Garnier renvoie ses héros comme les lecteurs à ce dur principe de réalité. Le background fantasy, par ailleurs fort réussi, agit comme un écran derrière lequel apparaissent en creux toutes les choses de la vie, simples, essentielles, universelles, que les enfants doivent comprendre et affronter pour grandir.

    Le récit explore brillamment de nombreux thèmes mais se cristallise sur la perte des illusions. Le dénouement ne verra aucun triomphe. Nul n'y gagne, nul n'en sort indemne ni même heureux...

    Du coup, bien qu'il ait beaucoup aimé, mon fils a trouvé cet album carrément triste. Effectivement, il manque sans doute à ce 4ème tome une dimension d'évasion que l'univers 'viking' laissait entrevoir au début. De cette mélancolie surgit pourtant à la fin un immense espoir où tous les possibles semblent se dessiner. Le principal est là.

    Une série qui brille autant par son superbe dessin, hyper lisible et sensible, que par son scenario, inattendu mais toujours cohérent.

    De la BD qui élève sans en avoir l'air, belle, humble, intelligente et émouvante. Bravo !

    Les enfants, oubliez un peu Mortelle Adèle... Et lisez "Bergères Guerrières" !

    Yovo Le 26/11/2021 à 20:14:22
    Bergères Guerrières - Tome 3 - Le périple

    Les décors s'élargissent, l'intrigue se densifie, l'univers se complexifie. Le périple des personnages n'en est que plus périlleux. Face à l'adversité, la petite troupe partie en Terres Mortes devra puiser dans les tréfonds de ses ressources pour poursuivre sa route et atteindre son but.

    Les jeunes lecteurs, eux, seront confrontés à de plus en plus de mystère et d'émotion. Les qualités graphiques et scénaristiques, inchangées, font de ce 3ème tome un superbe album de plus.

    Yovo Le 24/11/2021 à 21:39:19
    Bergères Guerrières - Tome 2 - La Menace

    Cette fois, une ténébreuse magie noire se mêle à l'histoire... Molly et Liam, accompagnés d'une puissante alliée se retrouvent seuls pour livrer un combat fatidique.

    Un deuxième tome beaucoup plus sombre, presque effrayant. Le scenario est toujours aussi nuancé et ne bascule jamais dans la facilité. Tous les personnages sont remarquables, avec leurs failles et leurs caractères bien à eux. Ils agissent pour de bonnes raisons et ressentent tous de la peur, quel que soit leur héroïsme. Le message adressé aux jeunes lecteurs est donc particulièrement intelligent : oui il est normal d'avoir peur, et non, cela n'empêche en aucun cas d'avoir du courage !

    Les dessins, toujours superbes, sont animés d'une énergie folle, de bonnes bouffées d'émotion et d'un rythme haletant. Une lecture réjouissante !

    Yovo Le 24/11/2021 à 20:30:37
    Bergères Guerrières - Tome 1 - La relève

    Drôle, enlevé, malin... Une BD jeunesse qui ne prend pas les enfants pour des crétins !

    Un scenario complexe, cohérent et fouillé ; des personnages crédibles et attachants... tout l'univers est super sympa. Il est de plus parfaitement mis en images. Le graphisme d'apparence simpliste est en fait très riche et élaboré avec un immense talent. Il a la grande qualité de se faire discret malgré sa beauté et de savoir s'effacer devant l'histoire, de la mettre réellement en valeur.

    Un excellent premier tome qui n'a rien à envier à la plupart des séries adultes sur des thèmes similaires.

    Je l'ai acheté pour mes enfants mais sa lecture m'a passionné.

    Yovo Le 18/11/2021 à 22:10:25
    Madeleine, Résistante - Tome 1 - La Rose dégoupillée

    J'ai attendu 2 mois avant d'ouvrir le "Madeleine, Résistante" remisé sur mes rayonnages. Je n'avais pas envie de le lire entre Goldorak et La Horde du Contrevent...
    Et j'ai bien fait je crois. Il faut être dans le bon état d'esprit pour affronter la réalité de l'Occupation. Les auteurs nous plongent littéralement dedans :

    D'abord visuellement avec le monochrome bleu entêtant qu'utilise Dominique Bertail au pinceau. La couleur est froide mais les personnages sont étonnamment chaleureux. La lumière est utilisée de façon magistrale et rend les visages expressifs et touchants. Les éléments de décors sont minutieusement détaillés et mis en valeur par des ambiances exceptionnelles. Tout est réussi : les intérieurs, la nuit, la pluie, la neige, la ville... Dans une époque si bien restituée, l'immersion est profonde et durable.

    Ensuite, le travail de JD Morvan au scénario est tout aussi subtil. Vivant, prenant et vibrant.

    Un point reste discutable : le témoignage de Madeleine Riffaud est souvent cité tel qu'elle l'a livré, en tutoyant l'auteur, dans de longs récitatifs. Et là, pour le coup, ça n'est pas très immersif puisque cela arrache le lecteur au contexte historique. On a parfois l'impression que certaines planches ne sont que l'illustration de ses souvenirs racontés au présent.

    Ca ne veut pas dire que ça ne fonctionne pas. Cela interrompt juste la narration pour créer un aller-retour entre deux temporalités. Ce parti pris a au moins le mérite de ne pas trahir la parole de cette grande résistante pour la transmettre respectueusement avec ses mots à elle.

    Une œuvre solide, intelligente et splendide que la suite devrait encore raffermir.

    Yovo Le 15/11/2021 à 20:48:12

    Impossible de ne pas s'extasier d'emblée par la pléiade d'auteurs ayant signé cet album. C'est un véritable fantasme de lecteur qu'a réalisé Tiburce Oger en rassemblant autour de lui la fine fleur du dessin réaliste, tous aguerris au genre western. Le résultat est carrément somptueux.

    Moi qui avais adoré la radicalité de "Jusqu'au dernier" de Félix et Gastine (qui a d'ailleurs remis ça ici en signant des planches de toute beauté) j'ai été également servi côté scénario. Car au-delà de l'idée de la montre qui passe de main en main en créant un fil conducteur, c'est l'aspect complètement dépouillé des mini récits qui m'a le plus enthousiasmé. Pas de chichi, pas d'harmonica, pas de chevauchée dans le soleil couchant. C'est aussi sec qu'impitoyable. Ca va vite, limite un peu trop vite parfois. Mais rapide ne veut pas dire bâclé. Mon histoire préférée, "La lettre", est aussi la plus courte : 2 pages ! Pas besoin d'en dire plus. La précarité d'une vie de pionnier en 1883 se passe de digression...

    Tiburce Oger s'est employé à démystifier le mythe, à le rendre à la réalité. Tous les ingrédients traditionnels du western sont là, c'est fait exprès. Mais sans manichéisme aucun. Il n'y a ni bons, ni méchants, ni héros. Les indiens meurent, les brutes avinées meurent, les soldats meurent, oui. Mais les simples fermiers, les femmes ou les enfants meurent aussi parce que c'est l'ouest et que c'était comme ça.

    Une œuvre superbe, édifiante et mûre. Qui pourrait malgré tout déplaire à certains car elle est presque frustrante. On aimerait juste qu'elle fasse le double de pages !

    Yovo Le 14/11/2021 à 12:13:56

    @ Pulp_Sirius

    L'excellentissime P.T.S.D est bel et bien dans la base de données du site, heureusement d'ailleurs ! Mais comme à chaque fois que l'on fait une recherche, BDGest demande qu'on soit précis : Il est donc référencé à "P.T.S.D" avec un point entre chaque lettre, sinon ça ne marche pas :)
    Je n'ai pas lu "Les larmes d'Ashura" mais je recommande "Golden Path" du même auteur, toujours au label 619.

    Yovo Le 12/11/2021 à 21:22:46

    Je vais être un peu sévère avec ce beau bouquin qu'est "Le droit du sol" et je m'en excuse par avance auprès d'Etienne Davodeau, dont je possède par ailleurs un bon nombre de titres.

    Avant tout, je veux saluer sa plume. Dans son genre, son écriture est ultra efficace. Elle peut être emphatique, économe ou introspective en fonction des circonstances, et toujours au bon moment. Elle est surtout riche d'une douce ironie, d'autodérision, de bonnes formules, et couronnée de valeurs d'humanisme, d'humilité et de respect. Un "journal" comme son sous-titre l'indique, qui donne envie de boucler son sac et de se lancer à l'assaut des sentiers.

    Mais - car il y a un gros MAIS - une autre caractéristique de M. Davodeau est qu'il s'empare de sujets sociétaux en les traitant de façon partisane. Ce livre est volontairement engagé. Ce n'est pas qu'une simple balade champêtre. On est clairement dans le militantisme et c'est revendiqué comme tel. Pour ma part, j'aurais préféré découvrir au fil des pages des pensées personnelles, des réflexions véritablement inspirées par son périple, plutôt que des copier/coller d'intervenants déjà entièrement acquis à sa cause. En souhaitant réveiller les consciences, il suscite forcément des réactions. Je réagis donc en contestant ses prises de position rigides et autres arguties rebattues.

    Car ce choix narratif, avec ses "invités" qui partagent virtuellement son chemin n'est pas toujours pertinent. Je n'ai pas compris le passage avec la sémiologue, par exemple, qui m'a semblé peu clair et un peu hors sujet. L'intention est honorable et la pédagogie utile mais le ton et les développements sont très orientés et beaucoup trop tarabiscotés pour moi.

    Le récit s'empêtre dans ces démonstrations pédantes et appuyées qui congestionnent le propos, alourdissent cette légèreté procurée par la marche et surtout, entravent cette liberté que l'auteur-randonneur veut célébrer dans ses pages.

    Je précise quand même que je ne suis pas un pro nucléaire. Et dénoncer l'impasse cauchemardesque des déchets est salutaire. Mais jamais Etienne Davodeau ou ses 'experts' n'expliquent comment ni par quoi le remplacer. Et ça, c'est beaucoup trop facile. Je suis lassé de ces discours professoraux assénés sans aucune nuance à grands renforts de spécialistes, sans contradicteur en face. Parce que c'est hélas la même forme de démagogie dont usent les énarques qui nous gouvernent. Si l'idée est juste de dire que le nucléaire c'est nul, ma foi, très bien, mais ça manque vraiment de fond alors. Et je ne saisis pas en quoi cette marche aide à le faire comprendre.

    Arrivé au terme du voyage (800km à pieds !) je me suis demandé pourquoi, du coup. Avec un effet "bah voilà, c'est fini" et l'impression que l'essentiel m'avait échappé.

    Son expérience fut intense, certes, mais le lecteur ne fait pas la même. Du fond de mon canapé je n'ai pas du tout ressenti ce vertige dont il parle.

    Pourtant, moi qui ai visité, ébahi, la grotte ornée de Fond-de-Gaume, je peux vous assurer que ce qu'on éprouve devant ces peintures préhistoriques est indescriptible et inoubliable.

    Et justement, j'adorais le postulat de départ : il y a 20000 ans, des sapiens ont légué de la beauté à leurs descendants, via ce fabuleux mammouth de Pech Merle ; puis d'autres sapiens vont léguer 20000 ans après du poison à leurs propres descendants... Quel sujet magnifique !

    Mais pour moi la question était surtout "que s'est-il passé entre les deux ? Pourquoi en est-on arrivé là ?"
    Aucune réponse à ça, malheureusement. Or, il y en avait, j'en suis sûr, ne serait-ce que dans la poésie ou la philosophie que Davodeau sait parfaitement manier. Son talent est tel qu'il aurait pu creuser un autre filon que l'activisme politique qui affadi considérablement, par sa petite lorgnette, la portée universelle de ces interrogations.

    Pour moi son questionnement, si profond qu'il soit, a loupé sa cible (cette espèce de trans-temporalité qu'il évoque) alors qu'il avait réussi à le faire dans le superbe "Rupestre !", ouvrage collectif auquel il avait participé de façon éblouissante. Là, le vertige était palpable!!

    Bel album, en somme, mais inutilement clivant.

    Yovo Le 08/11/2021 à 19:50:17
    La horde du Contrevent - Tome 3 - La Flaque de Lapsane

    Troisième tome, troisième ambiance :
    La 34ème Horde du Contrevent s'obstine à "contrer en trace directe", malgré les risques, et commence à s'embourber dans la redoutable Flaque de Lapsane. Golgoth, son inflexible et terrifiant traceur, seul responsable de ce désastre annoncé, révèlera à cette occasion une personnalité des plus inquiétantes qui fragilisera comme jamais la cohésion de la horde...

    Dans cette "Flaque de Lapsane", Éric Henninot s'attache principalement à l'action, sans autre enjeu que la survie. Ici, il n'est plus question des Fréoles ou des intrigues de L'Hordre. Le vent lui-même semble pratiquement absent du décor. Le récit n'en est que plus frontal, crépusculaire et rugueux, mais n'a pas la subtilité de "L'escadre frêle".

    En revanche les tensions, les doutes, les peurs et les trahisons qui se tissent entre les personnages sont saisissants, hormis quelques redondances, et interpellent sur les forces et les failles de la nature humaine confrontée à l'hostilité des éléments.

    Même si j'ai trouvé cet épisode d'une intensité inférieure aux autres, cette traversée garde quelque chose de titanesque qui maintient la Horde du Contrevent au niveau des grandes œuvres de la bande dessinée.

    Yovo Le 04/11/2021 à 13:34:57

    Allez, j'y vais moi aussi de mon petit couplet sur Goldorak :

    Comme tous les quarantenaires biberonnés à Récré A2, j'ai forcément la nostalgie facile. Sans avoir été non plus un grand fan de la série dans mon enfance, je me suis senti quasiment obligé d'acheter cet album, poussé par une petite voix intérieure...

    Mais ça va, ça fonctionne. C'est propre et bien goupillé. Du Goldorak pur jus avec un petit truc en plus qui en fait une BD pas si con que ça. Voire même très bien par endroits. Le scenario est malin, l'œuvre originale totalement respectée, portée par l'idée de la rendre plus mature avec une réflexion de fond et des personnages vulnérables.

    Pas du tout indispensable, faut pas exagérer. Mais à lire, oui, clairement.

    Yovo Le 30/10/2021 à 19:28:38
    Ténébreuse - Tome 1 - Livre premier

    J'étais plus qu'impatient de lire ce "Ténébreuse" que j'attendais depuis des mois. Pourtant, dès l'entame, j'ai très vite réalisé qu'il n'y aurait rien de spectaculaire ou de démesuré dans ces pages. Le récit est simple, fluide, maîtrisé. On reconnaît aisément le regretté Hubert dans cette volonté d'aller à l'essentiel, mais en prenant bien soin de casser les codes, de déjouer les attentes. A travers cette Heroic Fantasy sans esbroufe et parée d'une certaine gravité, c'est clairement le fond qui intéresse le scénariste. Il sait comme personne emmener le lecteur au delà des apparences vers - comme le dit la 4ème de couv - une réflexion sur nos monstres intérieurs.

    Hubert a réinventé le conte pour adultes en lui donnant cette forme atypique, chargée de symboles et de métaphores. C'est pour cela qu'il parvient toujours à faire vibrer en nous une corde sensible. Précisément parce qu'on ne s'y attend pas.

    Il est possible que ce premier tome ne convainque pas tout le monde à lui seul, mais la suite apportera à coup sûr cette profondeur que l'on devine déjà pour faire de "Ténébreuse" une grande œuvre et lui offrir une place de choix dans la Fantasy.

    D'autant que ce scenario est particulièrement bien servi par le talent de Vincent Mallié, très à l'aise sur ce terrain. La partie graphique est à mon avis encore supérieure à ce qu'il a réalisé pour La Quête de l'Oiseau du Temps. Avec toutefois un petit bémol : si les personnages sont parfaitement caractérisés dans l'ensemble, Arzhur le héros chevalier, m'a semblé trop peu expressif.

    En conclusion "Ténébreuse" est, dans le registre évoqué plus haut, pleinement réussi et a potentiellement de quoi finir en apothéose. Croisons les doigts !

    Yovo Le 24/10/2021 à 20:26:00
    Raven (Lauffray) - Tome 2 - Les Contrées infernales

    Le dessin est génial, rien à redire, mais le scenario !

    Au-delà des clichés déjà évoqués par tous dans le tome 1, la longue séquence de la jungle m'a laissé franchement perplexe.

    Exemples parmi d'autres :
    - Le garçonnet qui traverse tout seul et sans encombre une forêt infestée de dangers mortels...
    - Un des pirates qui se fait transpercer (on ne sait pas trop par quoi, d'ailleurs) page 42, mais qu'on retrouve à la scène suivante frais et guilleret comme si de rien n'était.
    - Le groupe qui saute à l'aveugle d'une falaise rocheuse dont "on ne voit même pas le fond", je cite, sans qu'aucun ne se fasse la moindre égratignure.
    Et d'ailleurs, combien sont-ils dans ce groupe ? Cinq ? Six ? Sept ? Impossible de les dénombrer en se fiant aux cases en tout cas, puisqu'il en manque toujours un ou deux alors qu'ils devraient être dans la scène (en fait ils sont 8 mais il faut le déduire...)

    Bref, la liste de toutes les incohérences est trop longue.

    J'adore les pirates, l'aventure et l'action, et Mathieu Lauffray a bien-sûr un talent fou pour les mettre en image (et j'achèterai la suite pour les dessins). Donc oui, d'accord pour les plus improbables péripéties, je veux bien ne pas être exigeant sur ce genre d'albums de pur divertissement. Mais par contre avec le minimum de crédibilité et de vraisemblance. Parce que là, c'est quand même un peu limite. "Raven" bascule involontairement dans la parodie.
    Sauf que "Pirates des Caraïbes" fonctionnait parce que c'était drôle ! Là non.

    Yovo Le 21/10/2021 à 20:35:30
    Negalyod - Tome 2 - Le dernier mot

    Cette suite du formidable "Negalyod" est un voyage aux confins de l'imaginaire, assez difficile à décrire.

    C'est une BD à l'ancienne, à la fois universelle et très personnelle, incarnée par un récit homérique et un graphisme grandiose. Il s'en dégage quelque chose de brut, de massif et de puissant qui, entre autres références, m'a évoqué l'ampleur mystique de l'Incal.

    On peut ne pas tout comprendre mais ce n'est pas le but. Il n'y a plus aucune prise avec la réalité. On est sur le champ de la symbolique, du mythe. Je vois dans cette fresque immense une parabole sur le destin de l'humanité, la fatalité même de son existence et son incapacité à évoluer.

    Les couleurs, notamment, contribuent à créer une poésie visuelle qui hypnotise littéralement. Et c'est justement cette sidération, ce pouvoir de contemplation qui permet au lecteur de perdre toute mesure, d'abandonner tout questionnement superflu et de s'immerger dans la lecture.

    Une œuvre profonde, méditative, audacieuse et ambitieuse qui marque une rupture. Elle peut vous happer, comme elle l'a fait pour moi, ou vous laisser complètement déconcerté au bord du chemin...

    Une chose est sûre, ces 2 albums deviendront une de mes BD-cultes. J'entends par là pas forcément génialissimes ou parfaites, mais auxquelles je pardonne tous les défauts car elles renferment un Graal : un aller simple pour l'évasion dans un univers unique, onirique, métaphysique.

    Vincent Perriot a l'étoffe des très grands !

    Yovo Le 20/10/2021 à 20:20:44
    Dans la tête de Sherlock Holmes - Tome 2 - L'Affaire du Ticket Scandaleux 2/2

    Ce second tome, toujours aussi brillant, utilise les mêmes dispositifs formels que le 1er. A savoir une mise en page spectaculaire, exubérante, ramifiée, enrichie de mille et un détails qui fournissent au lecteur observateur les moyens de mener l'enquête en temps réel.

    Certaines planches, très chargées, en font sans doute un peu trop mais les auteurs, en phase parfaite, ont l'élégance de ne pas dénaturer le plus grand détective de tous les temps. Ce fouillis visuel a le mérite de représenter efficacement la complexité de son esprit d'analyse et de déduction.

    Un travail impressionnant qui m'a procuré un vif plaisir de lecture.

    La réussite de ce diptyque ne peut, à mon avis, qu'en appeler d'autres à venir...

    Yovo Le 10/10/2021 à 13:18:52
    Blacksad - Tome 6 - Alors, tout tombe - Première partie

    Même si de mon point de vue, il n'atteint pas les sommets que sont " Artic-Nation " et " Âme rouge ", ce nouvel opus est du meilleur tonneau.

    Malgré une couverture assez moyenne, tous les fondamentaux de l'univers Blacksad sont en première ligne : un background 50's hyper détaillé, une galerie de personnages extraordinaire, une enquête en eaux troubles, un rythme trépidant, un ton mâtiné de cynisme et d'humour, de l'action, du suspens, de la culture, de l'amour... et toujours une puissante mélancolie pour napper l'ensemble.

    Quel bonheur de lecture après une si longue absence !

    Yovo Le 04/10/2021 à 19:28:50
    Docteur Radar - Tome 3 - Morts à Venise

    Une classe à part ce Docteur Radar !

    Du scénario, je retiendrai surtout les dialogues à l’ironie savoureuse, l’extravagance jubilatoire des situations et le panache des personnages, tous très en verve.
    Le reste de l’histoire est plus convenu, volontairement cantonné à l’esprit feuilletonesque des années 1920 avec le super méchant, génie du mal à plein temps, qui veut conquérir l’univers depuis sa base sous-marine secrète…

    Mais c’est surtout visuellement que Dr Radar est hors norme. A ce niveau ce n’est même plus du dessin mais une véritable création artistique, unique.

    Ce 3ème et dernier tome se déroule entièrement de nuit, ce qui donne à la lumière un rôle capital. Les éclairages, très théâtraux, projettent des ombres menaçantes et découpent à la serpe les visages et les décors pour plonger instantanément le lecteur dans une atmosphère vertigineuse de mystère, de glamour et d’effroi.

    Le jeu des personnages est à la fois exagéré et subtil, proche d’une pantomime expressionniste. Ils en imposent avec leurs mouvements dansants et leurs yeux écarquillés copieusement surlignés.

    Le découpage inventif et des cadrages déséquilibrés renforcent constamment la dramaturgie et confèrent une énergie tourbillonnante à chaque planche.

    La couleur, enfin, est la pièce maîtresse de ce langage graphique ; puisée dans une palette inhabituelle et peu usitée, chaque teinte participe à la structure de la case et lui donne son rythme et sa profondeur.

    L’ensemble témoigne d’une recherche esthétique et d’une maîtrise éblouissantes. Je n’ai pas d’autre mot que « chef d’œuvre » pour qualifier le travail de Bézian.

    Je préviens tout de même que cette trilogie reste exigeante. Le texte est riche et les planches ne se décryptent pas toujours au premier coup d’œil.
    Mais pour moi c’est une très grande BD. Bravo !!

    Yovo Le 27/09/2021 à 22:54:48
    Corto Maltese (Quenehen/Vivès) - Tome 1 - Océan noir

    En entamant la première page, la seule question que je me suis posée est : « Esprit de Corto, es-tu là ? »
    En terminant la dernière, la réponse fut « oui !», indubitablement. Pour la simple raison que Corto sera toujours Corto, quelle que soit l’époque. Il est intemporel. Océan Noir en apporte la preuve flagrante et rien que pour cela mérite d’être lu.

    Ce nouvel opus est (comme il se doit) une errance un peu planante, assez improbable, entre Japon et Amérique du Sud. Mais les dialogues allusifs et le graphisme éthéré le rendent beaucoup moins bavard et plus épuré que ses prédécesseurs. Cependant, la plupart des incontournables sont bien là : la nonchalance, le mystère, l’action, l’histoire, l’élégance, la pointe d’humour…

    À l’ironie du personnage répond d’ailleurs celle des auteurs qui semblent s’amuser d’avoir téléporté leur héros en 2001. Par exemple, Corto ne cesse de changer de casquette - 6 au total je crois - mais pas une seule fois ils ne lui feront porter sa cultissime casquette de marin, alors qu’ils savaient pertinemment que tout lecteur l’attendrait. Anecdotique, oui. Mais une façon pour eux de déconstruire le mythe pour mieux se l’accaparer et le retranscrire différemment.

    On peut bien sûr débattre longtemps de la pertinence d’avoir ancrer le personnage au 21ème siècle… Je respecte l’avis de chacun là-dessus mais ce n’est pas mon propos.

    Je note juste qu’Océan Noir aurait dû être un « Corto Maltese vu par…» et non un Corto Maltese tout court. Cet album n'a rien à faire dans la série. À part ça, c’est une aventure certes mineure mais rafraîchissante et une belle interprétation, tout à fait digne de sa lignée, dans laquelle on peut se laisser dériver avec plaisir et indolence. Ou pas.

    Yovo Le 23/09/2021 à 21:25:14
    Le dernier Atlas - Tome 3 - Tome 3

    Whaou ! Si j'étais un auteur de BD, je serais sans doute jaloux du Dernier Atlas. J'imagine du moins que c'est typiquement le genre de projet que la plupart aimerait réaliser. C'est ambitieux, complexe, maitrisé, intelligent, immersif et addictif. Ça ne ressemble à rien de ce que j'ai lu jusqu'à maintenant. Et quelle intensité ! Dans les 2 premiers tomes, les auteurs avaient déjà exploré le polar, l'uchronie et le fantastique. Le tout simultanément, avec réalisme et brio.

    Ce 3ème et dernier tome rajoute encore deux dimensions supplémentaires : le politique et la science-fiction, tout en restant cohérent et crédible. Ce tour de force est tout bonnement magistral !

    Mais comme si ce n'était pas suffisant, le Dernier Atlas réalise encore à mes yeux une autre prouesse. Concilier, voire réconcilier, la BD contemporaine et la BD classique. On l'avait déjà vu dans "Groenland Vertigo" qui prenait des allures de Tintin, le trait de Tanquerelle est extraordinaire pour cela. Expressif, détaillé, dynamique, tout en conservant une ligne presque claire, hyper lisible, qui rappelle parfois les indémodables auteurs d'antan. Le souffle de l'aventure et les élégants aplats de couleur de Laurence Croix font le reste.

    Je ne dirai rien sur l'histoire, il faut le lire !

    Enfin, pour rebondir sur la remarque d'herve26, Le Dernier Atlas est la seule série que j'ai intégralement en double, édition classique + édition N&B sous coffret. C'est dire si je la considère comme une œuvre définitivement à part. Définitivement indispensable. Bravo et merci.

    Yovo Le 07/09/2021 à 20:14:48
    RIP - Tome 4 - Albert - Prière de rendre l'âme sœur

    Disons-le d’emblée : j’ai ressenti une légère baisse de rythme dans ce 4ème tome.
    Cela tient probablement au personnage d’Albert lui-même, peut-être moins solide que les autres. Difficile de croire en effet qu’un simplet rachitique dans son genre puisse être ce psychopathe insaisissable œuvrant dans un hôpital désaffecté, tel un Dexter ou un Tyler Durden…

    Malgré ce décalage, cet épisode contient néanmoins beaucoup de surprises !

    Car c’est aussi cela, RIP. La façon dont les intrigues se croisent, se recoupent et s’additionnent depuis le début est totalement jubilatoire. C’est un puzzle mortel auquel chaque tome apporte son lot de pièces aussi sanguinolentes qu’inattendues. Même si « Albert » est un poil en dessous, il s’inscrit parfaitement dans cette mécanique diabolique qui ne laisse aucun répit au lecteur en l’entraînant toujours plus loin dans l’affreux. Je suis à chaque fois sidéré par les qualités graphiques et la précision implacable de la narration.

    Gaet’s et Monier, en repoussant ainsi les limites de tout ce qu’on avait coutume de lire jusqu’à présent, sont en train de réinventer le polar et réalisent l'une des plus grandes séries actuelles !

    Yovo Le 02/09/2021 à 13:54:12
    Undertaker - Tome 6 - Salvaje

    Au fil des albums, Ralph Meyer affine et peaufine toujours plus son dessin. Ce 6ème tome regorge de gros plans particulièrement réussis. Et comme la couleur de Caroline Delabie est heureusement plus lumineuse que dans le terne « Indien blanc », « Salvaje » est un régal pour les yeux.

    Le scénario est quand même assez improbable, mais sur l’ensemble de ce 3ème diptyque, il reste suffisamment fouillé et abouti pour accrocher même les lecteurs les plus grincheux (et je m’inclus dans le lot !). On n’est clairement plus dans du simple western, mais dans de la grande aventure épique et pleine de souffle.
    D’autant que le retour tant attendu de Rose, et peut-être de Lin et Jeronimus Quint ne semble plus très loin…

    Bref, un bon cru et un nouveau carton assuré !

    Yovo Le 28/08/2021 à 18:55:41

    Pour 3€, aucune hésitation !
    Le papier est épais et le format généreux. Les "articles", truffés de clins d'œil sont copieux et réjouissants à lire. Quant à la pub illustrée par Antonio Lapone, elle est vraiment stylée !
    Un petit Hors-série pas cher et franchement sympa pour les 20 ans de la série ; pas de quoi bouder son plaisir.

    Yovo Le 27/08/2021 à 23:43:36
    Undertaker - Tome 6 - Salvaje

    ::: CAHIER DE STORYBOARD - Tirage Limité :::

    Un collector pour les passionnés de la série. Et il y a de quoi l'être ! Le dessin de Ralph Meyer est exceptionnel et justifie amplement cette parution. Attention cependant... Le format est riquiqui, et vu son prix, certains la jugeront trop chère.

    Cette version crayonnée a pour atout sa reliure toilée, le numérotage à la main et le choix du papier.
    A contrario, la qualité d'impression peut paraitre moyenne. La trame, notamment, est souvent visible et fait apparaitre une multitude de petits points dans les traits. Cela fait perdre un peu de sa puissance au tracé, rendu presque flou par moment. J'ai vérifié : la plupart des cahiers graphiques que l'on trouve en fin d'albums sur les tirages limités, tous éditeurs confondus, sont en général bien plus nets.

    Ceci étant dit, ce carnet a quand même répondu à mes attentes. Si les lecteurs occasionnels n'y verront sans doute que peu d'intérêt, les collectionneurs, eux, y jetteront un œil attentif. Car en plus d'être un bel objet, il est probable qu'il devienne assez recherché d'ici quelques années. Comme tout ce qui touche à Undertaker...

    Yovo Le 07/08/2021 à 11:30:35
    Les chroniques de l'Univers - Tome 2 - Les Mangeurs de temps

    Vu sa diffusion réduite et ses critiques, je ne chercherai pas à vous convaincre que c'est une série géniale. Mais elle ne me semble pas si nulle que cela non plus.

    C'est un divertissement tout public, modeste, dépaysant et plutôt bien réalisé, sur lequel je ne porte pas un regard exigeant. J'ai même pris plaisir à le lire car un truc a réussi à m'accrocher. Les personnages, notamment, prennent une épaisseur intéressante.

    En tout cas, on sent clairement que le scenario a été pensé de manière globale. Et malgré les raccourcis et les facilités du récit, il aura sûrement quelque chose à défendre sur la durée qui pourrait valoir le coup. Ou pas.

    Yovo Le 20/07/2021 à 19:47:55

    "Fausses pistes" au pluriel.
    Un titre qui révèle la trame du scénario. En effet, Duhamel explore savamment plusieurs "pistes", de la chronique sociale au western historique en passant par le burlesque ou l'action. Mais il n'en suit qu'une jusqu'au bout : la plus intimiste. Celle qui nous plonge dans la psychologie de son personnage, un loser magnifique qui accomplira malgré lui son destin. Et il fallait bien cette narration multidirectionnelle pour qu'il y parvienne.

    Au final ce jeu de (fausses) pistes prend la forme d'un conte contemporain qui s'attache plus au sens des situations qu'à leur crédibilité. Cela permet à l'auteur de prendre des distances vis à vis de la réalité pour poser d'excellentes questions et rendre son récit passionnant. Car chaque scène est porteuse d'un message. En partageant ainsi sa réflexion, il fait appel à l'intelligence du lecteur pour transformer une histoire toute simple en une quête initiatique véritablement touchante.

    Acheté sur un coup de tête, j'ai pris un grand plaisir à lire cet album bien abouti et surprenant.

    Yovo Le 15/07/2021 à 18:57:26
    Le réseau Bombyce - Tome 1 - Papillons de nuit

    Habituellement je préfère commenter des albums récents mais une relecture du "Réseau bombyce" m'incite à poster un avis. Tout simplement parce que cette qualité de scénario se trouve de moins en moins à l'heure actuelle.

    Rien d'extraordinaire non plus mais juste une très bonne histoire, solide et bien bâtie : des héros charismatiques et vulnérables avec de vrais personnalités ; un univers soigné ; une intrigue élaborée, cohérente et fluide où toutes les scènes sont justifiées et habilement interconnectées ; un ton sombre et poignant ; un rythme soutenu... Bref, un travail impeccable.
    Alors on aime ou on n'aime pas mais c'est un vrai bon scénar comme on en fait peu aujourd'hui. Bravo monsieur Corbeyran !

    Comme le dessin de Cécil a aussi un caractère affirmé qui crée une superbe ambiance steampunk crédible et sans esbroufe, cela en fait une BD à part qui vieillit en se bonifiant et que je suis fort heureux d'avoir dans ma bibliothèque.

    A lire obligatoirement, bien entendu.

    Yovo Le 05/07/2021 à 22:36:43
    Green Class - Tome 3 - Chaos rampant

    Ce n'est pas si fréquent qu'un scénariste prenne de tels risques en faisant bifurquer ainsi le cours de son histoire. Ce qui commençait au tome 1 comme un Survival classique se transforme avec "Chaos rampant" en saga ésotérique à la Lovecraft ! C'est plutôt bien goupillé d'ailleurs, malgré la densité du contenu qui m'a demandé de m'y reprendre à deux fois pour commencer à comprendre...

    On peut ne pas accrocher, c'est certain. Mais être étonné à ce point en lisant une série est une qualité que j'apprécie. Du coup, même si tout ça est tiré par les cheveux, avouons-le, je suis curieux de savoir où cela mènera. D'autant que le dessin n'est pas désagréable et colle parfaitement à l'histoire.

    Ça part loin, c'est déroutant, mais dans son genre c'est assez réussi.

    Yovo Le 03/07/2021 à 12:51:39
    Les 5 Terres - Tome 6 - « Pas la force »

    Un 1er cycle prenant et parfaitement réussi. Il jette les bases d'une aventure au long cours qui sera passionnante si la suite se maintient et s'étoffe.

    Je pourrais éventuellement lui reprocher son rythme ralenti par l'abondance des dialogues, l'influence marquée de Game of Thrones ou encore trop de personnages secondaires sur certaines séquences. D'ailleurs je note à ce sujet que l'ajout de la galerie de portraits dans ce 6ème tome apporte enfin la clarté indispensable pour suivre l'intrigue.

    Mais foin d'esprit chagrin… "Les 5 Terres" est une série sacrément solide qui parvient à se démarquer brillamment dans un genre déjà pourtant surexploité.

    J'en serai donc pour les 24 tomes à venir !

    Yovo Le 01/07/2021 à 23:05:53
    Valhalla Hotel - Tome 2 - Eat the Gun

    Cette série étrange et décalée est une vraie curiosité !
    C'est du grand n'importe quoi, mais c'est rythmé, assez jubilatoire et très bien dessiné. Je ne la trouve pas aussi géniale que d'autres lecteurs mais elle gagne à être connue. A lire.

    Yovo Le 01/07/2021 à 10:47:48
    Mauvaise réputation - Tome 1 - La véritable histoire d'Emmett Dalton 1/2

    Il y a une classe intense dans cet album qui privilégie clairement l'esthétique à l'action.

    Il y aurait beaucoup à dire sur l'impressionnante partie graphique. A commencer par la superbe couverture qui en dit long sur la faculté d'Emmanuel Bazin à maitriser les vides et la lumière.
    Les personnages paraissent souvent cernés de solitude et de silence, au cœur d'espaces trop vastes pour eux.
    Les décors sont magnifiques, à la fois vaporeux et précis, parfois rehaussés de reflets ou de contrejours ; quelque part entre Edward Hopper et Voutch.
    Le découpage est classique mais efficace et la palette de bleus et de verts mélancoliques confère à chaque planche une élégance sobre et distinguée. Un travail vraiment splendide.

    Cette prédominance de l'image est favorisée par un rythme lent et des dialogues assez brefs. La narration, d'ailleurs, aurait pu gagner à être plus linéaire. Je m'y suis perdu de temps en temps, ne sachant plus trop qui est qui, avec cette impression de n'avoir que quelques pièces disparates d'un puzzle. A ce niveau-là, j'espère un peu plus de clarté au prochain tome. Mais finalement ça ne m'a pas semblé non plus si important que ça dans cette ambiance planante.

    Bref, bien plus qu'une biographie terre à terre, "Mauvaise réputation" est un western contemplatif qui ne fait pas dans le bourre-pif. Cela donne à la mythologie Dalton une autre dimension, plus réaliste et teintée d'une poésie sombre, comme le film "L'assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford" l'avait fait pour une autre figure culte de l'imaginaire collectif. Et ça fait du bien !

    Yovo Le 29/06/2021 à 20:20:37
    Gung Ho - Tome 5 - Mort blanche

    Ma lecture de ce dernier tome se résume un peu à "tout ça pour ça".

    Autant le précédent m'avait emballé par son rythme, sa dramaturgie et ses rebondissements, autant là, aucune prise de risque, pas de sursaut ni grosse surprise pour ma part. L'histoire se boucle bien mais d'une manière assez banale.

    Le principal atout de la série était son graphisme 100% numérique, époustouflant, avec ses effets de lumière et de relief sophistiqués très cinématographiques.

    Cette technique était novatrice et attrayante en 2013 mais elle a beaucoup perdu de sa force en 8 ans, de nombreux auteurs ayant proposé depuis des albums du même acabit. C'est aujourd'hui habituel. Du coup, il n'en reste pas grand-chose, à part une vision typiquement adolescente de l'apocalypse (jusqu'à la caricature !). C'est un peu régressif, ça rappelle les films de Spielberg des années 80.

    Dans l'ensemble la série reste donc cool et très sympa à lire, mais rien à voir avec le blockbuster révolutionnaire que l'éditeur avait voulu nous (sur)vendre à l'époque... Mais ça a marché ! A tel point que la fin, ouverte, pourrait bien donner une suite...

    Yovo Le 22/06/2021 à 22:29:54

    Je ne connaissais pas Aimée De Jongh, et le moins que l'on puisse dire c'est qu'elle est talentueuse !

    En s'emparant d'un authentique phénomène climatique (des tempêtes de sable) ayant marqué l'histoire des Etats-Unis par ses répercussions humaines et sociales, elle en impose avec son dessin clair et lisible, dont quelques traits suffisent pour rendre les visages expressifs et touchants.

    Les paysages et décors, très réalistes, bénéficient d'une atmosphère saisissante où l'on ressent la densité des nappes de poussière diffracter la lumière du Dust Bowl, cette région dévastée par une sécheresse cataclysmique au cours des années 30. Je me suis longuement absorbé dans les pleines pages à la beauté hypnotisante, impressionnantes d'un point de vue technique.

    Côté scenario, j'ai trouvé que l'intention de l'autrice se révèle assez vite, son jeune héros ne pouvant que se révolter au contact d'une si dure réalité. Mais l'aspect légèrement naïf du récit est gommé par une sincérité poignante qui parvient immanquablement à faire naitre l'émotion.

    Une BD superbe, doublé d'un beau travail d'édition, qui apporte un éclairage passionnant sur des faits peu connus chez nous. Bravo ! A lire absolument.

    Yovo Le 20/06/2021 à 19:17:57

    Grand admirateur de Charles Baudelaire, je ne pouvais qu'acheter ce titre. Un bel album qui permet de revoir cette grande figure du passé à travers un prisme féminin, voire féministe. Celui de Jeanne Duval, la maitresse métisse du poète, que tous ont voulu effacer.

    Le récit s'aventure bien au delà de la sphère littéraire et s'enrichit d'une dimension politique bien documentée qui recontextualise les protagonistes dans leur époque. C'est un excellent travail de scénario.
    La trame suit une voie chronologique, claire et fluide, en utilisant une longue lettre que Jeanne adresse à la mère de Charles. Elle y détaille la puissance de la relation qu'elle vivait avec son génie de fils. La vieille dame, bourgeoise et acariâtre, étant évidemment peu encline à reconnaitre cette "vénus noire" comme la muse et l'inspiratrice qu'elle fut pourtant pour lui.

    L'équilibre entre chronique sociale, biographie et romantisme, associé à la beauté ténébreuse des décors rend ainsi la lecture très agréable.

    Par contre un détail m'a tout de même chiffonné côté dessin :
    je n'ai pas reconnu Baudelaire dans le personnage au visage maigre, yeux écartés, cheveux frisés et nez bosselé, plein de la fougue d'un dandy insouciant qu'Yslaire a choisi de dépeindre. Il ne ressemble pas du tout aux quelques portraits connus de lui. Personnellement, je m'étais toujours imaginé un homme peu vigoureux, peu loquace, mélancolique et souffreteux... J'ai donc eu beaucoup de mal à me figurer qu'il s'agissait bien de Baudelaire au fil de ma lecture. Mais bon, comme je disais c'est un détail.

    Yovo Le 16/06/2021 à 22:27:41
    Le convoyeur - Tome 2 - La cité des mille flèches

    Pour une fois, je poste un avis très personnel n'ayant aucune valeur de critique.

    En effet, je ne nie pas que cette série soit de bonne facture mais elle me laisse largement mitigé.

    Si le dessin de Dimitri Armand reste excellent, voire exceptionnel, je n'adhère définitivement pas au scenario. L'univers est certes intéressant (un genre de post-apo médiéval) mais trop perché pour moi. Même en lâchant prise, rien ne m'y fait croire un seul instant. Et ce depuis la 1ère page du 1er tome.

    Cette "cité des mille flèches" n'arrange rien, la sauce ne prend toujours pas.

    Dommage, j'aurais vraiment aimé adorer cette série qui, en théorie, avait tout pour me plaire. Car en plus de l'aspect 'comics' qui m'horripile avec ces super-mutants un peu ringards, c'est le "convoyeur" même qui ne me convainc pas du tout. Impossible pour moi de m'attacher à un personnage aussi bourrin, antipathique et "bizarre" !

    A tel point qu'à la fin de ce 2ème tome je n'ai aucune curiosité pour la suite. Je l'achèterai quand même avec l'espoir d'être agréablement surpris mais j'avoue ne plus trop y croire.

    Yovo Le 24/05/2021 à 22:52:19
    Urban - Tome 5 - Schizo robot

    Il n’aurait pas fallu qu’une conclusion aussi longtemps attendue déçoive ! Heureusement, ce 5ème et dernier tome est aussi beau que prenant. Je note l'album à l’aune de la série entière qui mérite ses cinq étoiles. Série qui semble d’ailleurs avoir été bien peu promue et défendue par Futuropolis... C’est étonnant, désolant même, vu la qualité générale de la réalisation : dessin et scenario parfaitement en phase captivent à chaque page.

    Mi science-fiction, mi anticipation, l’univers profondément ténébreux développé par "Urban" est particulièrement maitrisé et abouti, même s’il peut rappeler certaines productions d’un genre proche. Et si cet ultime opus ne répond pas précisément à toutes les questions, il boucle de façon fluide et cohérente une série foisonnante, spectaculaire, inventive, intelligente, glaçante. En un mot, incontournable.

    A découvrir absolument pour ceux qui seraient passés à côté.

    Yovo Le 24/05/2021 à 22:48:47

    Frantz Duchazeau est un auteur émérite et son « Peintre hors la loi », à l’image de sa couverture, est superbement illustré.

    En revanche, son récit est âpre, sec et sans concession.

    Au regard de la pagination généreuse, je m’attendais à plus de développements dans le scenario et à davantage de finesse, voire de psychologie dans le portrait qu’il brosse du peintre Lazare Bruandet. Même si quelques éléments traumatisants de son passé sont évoqués, il est surtout dépeint comme un homme peu attachant dont on ne retient que le caractère farouche et ombrageux. Rien ou presque sur sa peinture elle-même, le feu créatif qui l’anime et le dévore, son parcours révolutionnaire ou la place du contexte artistique dans cette époque violemment troublée. C’est un choix respectable mais qui m’a laissé un goût d’inachevé et limité mon intérêt pour cet ouvrage, malgré la grande beauté de l’ensemble.

    Yovo Le 27/04/2021 à 22:30:51
    Les contes de la Pieuvre - Tome 3 - Célestin et le cœur de Vendrezanne

    « Les contes de la Pieuvre » sont indescriptibles. Dans le sens où leur contenu, leur concept, leur réalisation dépassent totalement mes capacités de description. Et c’est évidemment un compliment.

    Je me demande encore comment Gess a pu créer à lui seul un univers aussi cohérent, complexe et singulier. Je trouve ça fabuleux, tant en termes de graphisme que de scenario. Et le superbe travail d’édition de Delcourt parachève l’ensemble.

    Ce 3° tome, qui comme les précédents allie magistralement fantastique, Belle Époque, mafia et pouvoirs surnaturels, est en plus profondément humaniste. Car comme son titre l’indique, il est question de cœur dans cet album. Mais, si celui de Vendrezanne est un spectre horrifique et meurtrier, l’auteur n’oublie pas tous ceux des pauvres hères miséreux qui hantent ses pages et les bas-fonds parisiens en cette fin de 19°s. Leur condition et leurs portraits nous touchent; leur destin nous révolte. Et les vers mélancoliques d’Albert Samain, égrenés en tête de chapitre les accompagnent de bien belle manière.

    De la bande dessinée à plusieurs niveaux de lecture, inspirée, rare et généreuse, qui élève le lecteur. Des albums relativement exigeants, certes, mais indispensables.

    Yovo Le 19/04/2021 à 19:40:31
    Lucky Luke (vu par...) - Tome 3 - Wanted Lucky Luke

    Quel plaisir !! Je me suis franchement régalé en lisant cet album.

    Rien de révolutionnaire pourtant… mais un rythme ultra fluide, de bons personnages, des rebondissements, de superbes décors, de l’humour et même un brin d’émotion… Je n’en demande pas plus.

    A mes yeux, Matthieu Bonhomme est un magicien qui a réussi l’impossible : faire « son » Lucky Luke sans copier servilement ni avoir ce besoin pénible de se démarquer à tout prix. Il a œuvré tout en finesse, modestement et respectueusement, avec une élégance rare, dans son dessin comme en esprit.

    J’espère en tout cas que ces 2 premiers albums nés sous sa plume donneront naissance à une longue et – forcément – magnifique série !

    Yovo Le 18/04/2021 à 19:07:34
    Marshal Bass - Tome 6 - Los Lobos

    J’aime beaucoup Marshal Bass que je considère comme une série de premier plan. Mais « Los Lobos » m’a un peu moins enthousiasmé. En cause, un rythme un poil mou, des personnages secondaires assez peu développés, une « mission » moins spectaculaire que d’habitude – même si River Bass va comme toujours au casse-pipe – et un découpage parfois étrange qui n’aide pas à la compréhension de certaines situations.

    En revanche, le ton est toujours aussi poignant et désenchanté. C’est une des grandes forces de cette excellente série.

    Yovo Le 18/04/2021 à 12:27:14
    Trilogie du Moi - Tome 3 - Moi, menteur

    Cette série est définitivement brillante, malgré une notoriété confidentielle.

    Chaque tome semble un one-shot puisque les intrigues et les protagonistes n’ont a priori aucun rapport entre eux. Pourtant, « Moi menteur » fait des liens jubilatoires avec les 2 tomes précédents et prouve qu’il s’agit bel et bien d’une trilogie parfaitement orchestrée.

    La lecture est toutefois exigeante car le contenu est très dense. L’action se trame dans les arcanes véreux de la politique espagnole et met en scène de très nombreux personnages. Le jeu des manipulations, des trahisons et des faux-semblants tisse un polar complexe et mortel, dont certaines subtilités peuvent être parfois difficiles à suivre. Mais quelle intelligence dans le propos et quelle maitrise dans la construction ! Le graphisme, toujours aussi marquant, y fait beaucoup. Un noir & blanc sombre et réaliste, avec ses touches de vert, comme le fiel du mensonge qui imbibe le récit.

    Altarriba et Keko signent une œuvre absolument remarquable avec ces 3 albums faussement indépendants, qui gagnent une profondeur extraordinaire pris et lus ensemble, pour devenir la fascinante « Trilogie du Moi ».

    Yovo Le 28/03/2021 à 21:18:19
    Les chefs-d'œuvre de Lovecraft - Tome 6 - Celui qui hantait les ténèbres

    Chaque nouveau tome des "Chefs d’œuvres de Lovecraft" est une pépite, même si l'intensité semble légèrement faiblir au fil des parutions. Les 2 récits réunis ici peinent à saisir le lecteur et ne parviennent jamais véritablement à le plonger dans l’effroi ressenti par les personnages. C’est un peu dommage tant cette série est magnétique et superbement éditée.

    Mais si le scenario de « Celui qui hantait les ténèbres » manque selon moi d’épaisseur et de frisson, la lecture reste fascinante grâce au toujours superbe dessin de Gou Tanabe qui parvient à créer des ambiances expressionnistes de toute beauté.

    Les amateurs de la série l’achèteront les yeux fermés ; ceux qui voudraient la découvrir, préférez plutôt "les Montagnes hallucinées" ou "La couleur tombée du ciel" pour commencer.

    Yovo Le 19/03/2021 à 22:58:56
    On Mars_ - Tome 3 - Ceux qui restent

    « Ceux qui restent » clôt en beauté une trilogie marquante, même si le scenario de ce troisième tome est sans doute moins subtil que les précédents. En effet, la majeure partie de l’album est consacrée à la bataille finale entre les différentes factions présentes sur Mars. Ça tire donc dans tous les sens et il est parfois difficile de distinguer les belligérants. Mais la fin, franchement réussie, rattrape aisément cet aspect parfois peu digeste. Sur l’ensemble des trois tomes, le scenario reste donc particulièrement bien ficelé.

    Il faut bien sûr ajouter à cela l’impeccable mise en image de Grun, dont le trait a encore progressé depuis « Metronom’ ». Son travail est superbe ! En plus d’un character design convaincant et du soin apporté au réalisme des décors, « On Mars_ » brille surtout par sa magnifique palette de couleurs qui plonge instantanément le lecteur dans une ambiance dépaysante.

    Une série de grande qualité, sans aucun conteste, bien éditée par Daniel Maghen.

    Yovo Le 04/03/2021 à 21:52:41

    Adaptation fidèle mais extrêmement concise de l’œuvre de Jules Verne. Aucune fioriture, aucun temps mort, ça va très vite. Et ce rythme trépidant est tout à fait raccord avec le thème. Le dessin est assez peu précis mais retranscrit très bien les différentes ambiances. Un album efficace et agréable à destination d’un jeune public.

    Yovo Le 04/03/2021 à 21:45:06

    « A fake story » nous entrainent au cœur d’une mystérieuse tuerie, provoquée – selon les apparences – par la fameuse émission d’Orson Welles, diffusée sur CBS le 30 octobre 1938. L’acteur sema la psychose dans le pays en annonçant en direct une fausse invasion extraterrestre. Mais comment une fiction a-t-elle pu ainsi être interprétée comme la réalité ? C’est cette troublante question qui sert de point de départ.

    Sur la forme, il manque ici ou là quelques développements, mais le fond de l’intrigue reste passionnant : le shérif d’une bourgade rurale, secondé par un journaliste de la chaîne, n’a que 72 h pour boucler son enquête avant de transmettre le dossier au FBI. Trois jours pendant lesquels la vérité peut sortir… ou bien être définitivement enterrée !

    Laurent Galandon tisse un scénario malin et rythmé qui met en abime les faux et usages de faux. Une rapide recherche sur internet vous dévoilera d’ailleurs l’astuce qui s'y cache... Son récit dénonce habilement toutes les manipulations, illusions ou dissimulations qui nous font tordre la réalité des faits dès que notre intérêt rentre en jeu. Et ces dévoiements résonnent particulièrement fort à l’ère des fake news et des jugements rendus par le tribunal des réseaux sociaux.

    La partie graphique est comme toujours impeccable avec Jean-Denis Pendanx. L’homme a du talent et le résultat est simplement superbe ! Son travail parfaitement documenté, son souci du détail et ses personnages bien croqués créent de suite une ambiance immersive dans l’Amérique profonde d’avant-guerre. Les couleurs automnales sont un gros plus et rajoutent un grain vintage très plaisant à l’ensemble.
    En revanche, un bémol pour la typo peu lisible. Hormis ce détail, c’est un solide polar qui soulèvent de bonnes questions ; et au-delà, une très bonne BD.

    Yovo Le 28/02/2021 à 22:36:21
    Les ogres-Dieux - Tome 4 - Première-Née

    « Première-née » m’a réconcilié avec la saga des Ogres-Dieux sur laquelle j’ai toujours eu quelques réserves. Ce 4ème tome, que je n’attendais pas après le décès du scénariste Hubert, permet de boucler la boucle en faisant un lien généalogique parfait avec « Petit », le tome inaugural.

    Remonter aux origines d’une lignée légendaire est un grand classique. Mais c’est ici réalisé avec intelligence et le récit capte l’attention par sa force d’évocation. Il se place ouvertement du côté des femmes, reléguées dès le départ au rang de génitrices à la merci de mâles stupides et libidineux, tous plus barbares les uns que les autres. Bragante, la première-née, n’a ainsi d’autre salut pour contrer leur force brutale que sa finesse d’esprit et la connaissance qu’elle trouve dans les livres, auxquels Hubert rend également un hommage appuyé. L’album se termine d’ailleurs par 18 longues pages d’un texte raffiné, superbement illustré.

    « Première-née » n’est peut-être pas l’épisode le plus spectaculaire des 4 mais il donne du sens et une ampleur inattendue à l’ensemble, tout en renouant avec le fabuleux univers gothique créé par Hervé Gatignol, que le troisième avait curieusement délaissé.

    Je me ravise donc humblement et porte un jugement beaucoup plus favorable sur cette série au graphisme exceptionnel qui restera en bonne place dans ma bibliothèque.

    Yovo Le 18/02/2021 à 19:50:28

    Anaïs Nin fut vraiment une personnalité hors du commun et elle méritait bien, à ce titre, d’être l’héroïne d’un roman graphique. Encore fallait-il qu’il soit suffisamment abouti pour respecter son œuvre sans mollesse ni tiédeur, mais sans non plus tomber dans le scabreux. Et Léonie Bischoff a réussi la biographie parfaite. Son univers visuel est d’une beauté aérienne et gracile. Le trait multicolore, épuré, parfaitement équilibré entre les pleins et les vides procure une lumière chatoyante aux planches et plonge le lecteur dans une ambiance onirique et voluptueuse qui sert à merveille le récit. Celui-ci s’axe sur la transformation progressive d’Anaïs, de jeune mariée innocente à la sensualité réfrénée, en une amante polyamoureuse assouvissant ses désirs multiples.

    Tous ses paradoxes apparaissent alors :

    Femme libre à l’esprit trop large pour son époque, jouisseuse, épicurienne, sans aucune limite, féministe, avant-gardiste, écrivaine de génie…

    Mais aussi dépendante du regard de l’autre, incapable de dire non, immature, névrosée, borderline, flirtant sans ambages avec la perversion la plus sordide…

    Un portrait d’une complexité rare dont l’autrice a fait un régal de lecture à travers un très bel album, élégant, poétique, poignant, troublant, fascinant. Bravo !

    Yovo Le 14/02/2021 à 22:04:01

    « Les voyages d’Ibn Battûta » tient plus du récit illustré ou du carnet de voyage que de la bande dessinée. Joël Allessandra, coutumier du genre, est donc à l’aise pour retranscrire par des aquarelles, parfois magnifiques, les innombrables contrées prétendument visitées par Ibn Battûta de 1325 à 1354. Cet insatiable voyageur aurait parcouru, sur 3 continents, toutes les terres d’islam de son époque et fit écrire ses exploits, réels ou supposés, par un scribe.

    Une histoire aussi fertile aurait pu donner une épopée mémorable, la BD étant le format idéal pour procurer l’évasion et les mirages d’un tel voyage. Mais Lotfi Akalay, décédé en 2019, fut sans doute un grand écrivain mais pas un scénariste. Le récit manque hélas de fluidité. Les scènes, hachées, se succèdent sans contexte, ni dramaturgie. Et la rareté des dialogues limitent au strict minimum les interactions entre les personnages, pourtant pittoresques.

    Cet album, objectivement riche et intéressant, est donc à réserver aux férus de voyage, aux passionnés d’histoire ancienne ou aux spécialistes du monde musulman.

    Yovo Le 11/02/2021 à 21:20:49
    Vernon Subutex - Tome 1 - Première partie

    Une œuvre colossale dans tous les sens du terme ! 300 pages chargées d’un texte dense, intense, dans lequel s’est littéralement fondu Luz, avec une puissance et une liberté éblouissantes. Ses dessins enflamment les planches avec la même énergie rageuse que les mots de Virginie Despentes. Le résultat est une véritable dissertation graphique sur le thème « sex, drugs & rock n’roll ».

    C’est extrêmement long à lire mais il fallait bien ça pour décortiquer aussi précisément le milieu underground des années 80/90, dans son nihilisme, sa fureur et sa démesure. Avec, en filigrane, le souvenir persistant de tous ceux qui y sombrèrent.

    « Vernon Subutex » n’est pas qu’une adaptation, c’est la BD exceptionnelle de deux très grands auteurs en parfaite symbiose.

    Par contre, inutile de préciser que tous les tenants d’une morale proprette passeront leur droit chemin !

    Yovo Le 31/01/2021 à 21:33:51
    U.C.C. Dolores - Tome 3 - Cristal rouge

    Vu la finesse pachydermique du scénario depuis le début, j’entamai ce 3ème tome avec un a priori négatif. Mais j’avoue que Didier Tarquin a réussi à m'étonner. Non par la qualité de son écriture, je n’irai pas jusque-là, mais par le lot de surprises qu’elle réserve. Il booste son rythme, multiplie les rebondissements et ne prend pas de pincettes pour boucler son cycle. C’est conclu et bien conclu ! De plus, toutes les questions posées ici ou là depuis l’entame trouvent des réponses cohérentes et l’ensemble se tient plutôt bien.

    L’énergie et la radicalité de ce « Cristal rouge » offrent donc une lecture 100% récréative franchement plaisante.

    Yovo Le 23/01/2021 à 21:43:32
    La chute (Muralt) - Tome 2 - Épisode 2

    « La chute » est une version catastrophe de la crise sanitaire, sociale et environnementale que nous vivons actuellement, qui se projette dans l’effondrement de notre société. Car même si ce 2ème volet suit une trame assez classique, l’atout de cette série est son réalisme prenant. Une qualité qui fait trop souvent défaut aux récits post-apocalyptique qui ont toujours tendance à recourir au fantastique pour justifier la fin du monde. Là, nous assistons aux difficultés d’un homme ordinaire qui essaye juste de mettre les siens à l’abri, sans qu’ils sachent réellement ce qu’ils fuient. Mais ce pauvre Liam n’a pas le profil d’un survivant. Il n’est ni entrainé ni équipé pour affronter un monde devenu brusquement mortel : une pandémie de grippe et la violence des hommes livrés à eux-mêmes faisant autant de morts l’une que l’autre. Aucun moyen physique, intellectuel ou technique particulier ne peut l’aider à préserver l’essentiel. Ses efforts, ses échecs, ses craintes, sa vulnérabilité pourraient donc être les nôtres.

    Jared Muralt n’est pas le plus expérimenté des auteurs et cela se ressent parfois au fil des pages tant dans le dessin que dans le scenario (Cf. l’avis de thieuthieu79). Mais cela ne m’a en rien gâché la lecture et en tant qu’amateur du genre, je trouve « La chute » vraiment réussie. Ces deux tomes m’ont accroché au point d’attendre le 3ème avec grande impatience.

    Je constate que cette série est malheureusement mal notée. Donnez-lui sa chance, elle mérite largement d’être lue ! Ma note reflète mon envie de la défendre.

    Yovo Le 19/01/2021 à 21:53:57
    Les 5 Terres - Tome 5 - « L'Objet de votre haine »

    « L’objet de votre haine » est toujours mené par une écriture aussi brillante. Les joutes verbales s’enchainent et déchainent passions, trahisons et manipulations. L’orgueil léonin et la rouerie étant parfaitement incarnés par Mederion, souverain aussi dangereux qu’intelligent, et Térys, son ombre au jeu trouble. L’habileté politique sans égale du jeune roi peut à elle seule faire basculer le destin d’Angleon et c’est là toute la force du scenario qui parvient sans cesse à surprendre le lecteur.

    Toutefois, on s’approche déjà de la fin du 1er cycle et je m’étonne que cet avant-dernier tome ne fasse guère avancer l’intrigue. Car ces complots fomentés dans le secret des alcôves deviennent habituels et gagneraient à être contrebalancés par un peu plus d’ampleur et d’action. Il est un peu dommage que les arcs narratifs parallèles, plus riches en mouvement, ne soient qu’entr’aperçus dans ce 5ème opus. J’espère donc que le rythme final s’accélèrera sensiblement pour nous offrir la conclusion épique que cette série mérite.

    Yovo Le 17/01/2021 à 22:14:49
    Valhalla Hotel - Tome 1 - Bite the Bullet

    Ce 1er tome est sympathique mais pas de quoi s’emballer non plus.
    A partir d’une base ultra référencée – des voyageurs s’échouant dans un motel vide au milieu de nulle part, cernés de gens plus ou moins louches – « Valhalla hotel » fait monter tranquillement la sauce avec de bons ingrédients. Mais vu la couverture et l’affiliation évidente avec « Il faut flinguer Ramirez », je m’attendais à beaucoup plus détonant. Les dialogues restent assez sages et le rythme n’a rien de trépidant. Les différents personnages sont pourtant bien incarnés et immédiatement identifiables. Mais leurs rôles étant encore trop flous à l’issue de ces 60 planches, il est difficile de s’y attacher pour l’instant.

    D’autant que le dessin est bon, mais particulier. Si les tronches des acteurs sont bien trouvées et l’action parfaitement rendue par des cadrages dynamiques et efficaces, l’obsession géométrique de Fabien Bedouel m’a paru en revanche un peu décalée. Comment peut-on tracer à la règle les bords d’une route poussiéreuse au Nouveau-Mexique ?? Idem pour tous les bâtiments et chaque élément de décors…Tout est rectiligne, lisse, soviétique. Si l’on rajoute une colorisation ingrate (personnages jaunâtres, fonds de cases neutres) qui refroidit tristement l’action censée se dérouler sous une chaleur désertique, on peut avoir quand même une légère impression de trop peu. C’est frustrant car on devine clairement un gros potentiel à la clé. La lecture est d’ailleurs très agréable. Mais avec une image un peu plus naturelle et mieux texturée, son effet serait décuplé.

    Ces petites critiques ne m’empêcheront pas bien sûr de suivre cette série qui connaitra probablement un beau succès. Allez, go !

    Yovo Le 15/01/2021 à 19:46:50

    « David Boring » était devenu rare. Sa réimpression par Cornélius en 2017 s’imposait donc.

    J’imagine qu’on ne doit pas être des foules à tenir ce roman graphique pour un chef d’œuvre mais c’est mon cas. Il rassemble le meilleur du petit monde intrigant de Daniel Clowes. Une ligne claire un peu statique flanquée d’une trame grise uniforme, une écriture souvent verbeuse mais toujours subtile, des anti-héros presque ordinaires gorgés de névroses, une sexualité engoncée entre fantasme et déviance, des angoisses existentielles, des airs de fin du monde… et cette étrangeté tragi-comique omniprésente et indéfinissable, véritable signature de l’auteur.

    Je comprends qu’on puisse être hermétique à cet univers peu glamour, hanté de personnages pathétiques, de mésaventures improbables et de références intello. Mais avec cette matière aride, Clowes arrive à traduire les mille petits maux muets qui se logent en chacun de nous, les plus profondément enracinés, ceux qui nous rendent aussi solides que vulnérables, banalement et singulièrement humains. En toute subjectivité, cela suffit pour en faire un génie à mes yeux !

    Yovo Le 11/01/2021 à 20:08:05
    Le vagabond des Étoiles - Tome 2 - Seconde partie

    Une suite directe du 1er tome avec lequel elle forme un vaste et poignant pamphlet contre le régime carcéral en vigueur aux États-Unis au début du 20°siècle, et par extension contre l’oppression de l’individu en général. Mais nul discours partisan ou grande tirade moralisatrice ici. Riff Reb’s adapte Jack London avec intelligence et livre un diptyque plein d’aventure et d’inconnu, humaniste, poétique et puissant, davantage axé sur un dessin à la fois réaliste et onirique que sur les mots. Il parvient à en dire beaucoup plus ainsi et révèle la puissance de l’imaginaire, qui ne sert pas seulement à rêver, mais bel et bien à vivre.

    Une œuvre troublante et passionnante à lire absolument.

    Yovo Le 10/01/2021 à 22:12:10
    Il faut flinguer Ramirez - Tome 2 - Acte 2

    Comme le dit Nicolas Pétrimaux lui-même, IFFR est plus un « static picture », autrement dit un film dessiné, qu’une BD.
    J’aime bien, mais je ne fais pas partie du fan club de cette esthétique de jeux vidéo appliquée au 9ème art. Le dessin numérique a son intérêt mais il ne fait pas tout. Or, ce graphisme ostentatoire en met tellement plein la vue qu’il a tendance à l’emporter sur l’histoire. Histoire qui, il faut le dire, possède une qualité majeure : son rythme frénétique, créé par une mise en scène brillante et inventive. Ce tempo parfaitement maitrisé est un modèle du genre.

    Pour le scenario en lui-même, on a 80% de boum boum et d’enrobage – effets de cadrages, de perspectives et de couleurs, tous très efficaces – et 20% d’un récit relativement pauvre, truffé de gimmicks et de situations loufoques, qui, au delà de son allant, ne débouche sur rien de très consistant pour l’instant. Je passe sur les fausses pubs à l’humour assez bas du front ; ce genre de conneries ne me fera jamais rire mais je reconnais que c’est stylé et que ça donne une identité forte à l’ensemble.

    Le défaut principal, pour moi, est de n’avoir pas créé de véritable héros à cette histoire. Ramirez est quand même un peu neuneu et aucun personnage n’émerge du lot à part peut-être Ramon, le tueur, que sa capacité à ne pas mourir rend intéressant. Mais ce choix narratif m’a semblé discutable car finalement, la double ou triple vie de Ramirez devient secondaire, et la maigre intrigue finie noyée sous la pyrotechnie et les couches de vernis.

    4 étoiles pour l'ambiance, la beauté des planches ET le boulot monumental que cela représente. Mais visuellement spectaculaire ne veut pas dire révolutionnaire... Au vu du battage médiatique hallucinant dont elle bénéficie, cette série est quand même un peu surcotée, exactement comme les films de Tarantino desquels elle s’inspire. Un divertissement de luxe, flatteur pour la rétine, mais dénué de réflexion, de finesse, de toute profondeur. Ça tombe bien, c’est apparemment exactement ce que voulais faire Pétrimaux : « Un truc d’action qui ne se prend pas la tête » a-t-il dit en interview.
    Moi, il m’en faut quand même un peu plus pour déchainer mon enthousiasme…

    Yovo Le 03/01/2021 à 17:37:11
    Les chefs-d'œuvre de Lovecraft - Tome 5 - L'appel de Cthulhu

    Une adaptation de l’œuvre phare de Lovecraft toujours aussi bien réalisée. Gou Tanabe parvient à s’appuyer sur une narration à tiroirs sans perdre le lecteur. En revanche, si ces nombreux sous-récits sont indispensables pour faire comprendre les origines du culte de Cthulhu, ils diluent et dispersent largement la montée en puissance de l’horreur. Le crescendo vers « l’indicible » est donc moins efficace que dans les précédents tomes qui, en se concentrant sur une seule et même aventure, s’avéraient beaucoup plus angoissants et prenants. Ils avaient pour eux une forme d’abstraction qui fait défaut ici.

    Je me demande simplement s’il ne manque quelques pages à cet Appel de Cthulhu. Il aurait peut-être mérité plus d’ampleur pour permettre aux personnages de mieux exister et au suspense de s’installer progressivement.

    C’est donc celui qui m’a le moins enflammé pour l’instant mais il reste de très haut niveau.

    Yovo Le 01/01/2021 à 20:11:32

    Le superbe « Terra Australis » racontait l’arrivée au 18°s des 1ers colons en Australie, bagnards ou prostituées pour la plupart. Le pays s’appelait encore alors la Nouvelle-Galles du sud et avait le redoutable statut de colonie pénitentiaire.

    « Terra Doloris » a été annoncé comme une suite mais n’en n’est pas vraiment une : Mary Bryant et Thomas Muir, deux personnages ayant réellement existé, vont réussir à fuir cette prison à ciel ouvert, et c’est le périple de leurs évasions respectives par-delà les mers que l’on va suivre au long de ces 350 pages.
    Toute la profondeur du scenario est là : ils considèrent tous deux pour des raisons différentes que le continent austral est maudit. Mais c’est précisément en fuyant cette 'terre de douleur' qu’ils connaitront chacun le malheur et l’adversité.

    Le travail documentaire de L.F. Bollée est comme toujours remarquable. Il sait admirablement tirer parti des éléments historiques qu’il collecte pour faire revivre l’époque. D’un contexte déjà passionnant en soi, il fait une aventure humaine palpitante, doublée de réflexions pertinentes sur la liberté.

    Ph. Nicloux réalise également un excellent travail au dessin. Son style particulier ne sert pas forcément les personnages, dont on peine parfois à reconnaitre les visages d’une case à l’autre, mais il fait des merveilles dès qu’il s’agit de décors ou d’ambiances.

    Un beau livre, aussi divertissant qu’instructif, qui complète bien « Terra Australis », même s’il est probablement moins inspiré.

    Yovo Le 30/12/2020 à 20:59:39

    Sombre et moite sous ses airs de polar, « L’homme bouc » se révèle très actuel et franchement prenant. Il explore plusieurs pistes intéressantes mais n’en suit qu’une, plutôt inattendue. On pense forcément aux œuvres du grand Comès puisqu’il y est beaucoup question d’ésotérisme et plus encore de chamanisme, avec pour décor quasi unique les boueuses forêts limousines, noircies par un hiver sinistre. On accroche ou pas, mais le récit a le mérite d’aller au bout de son propos, sans concession, bien aidé par un rythme sec et des personnages peu diserts mais très humains. E. Corbeyran connait son boulot. Ce qui ne m’a pas empêché de noter quelques facilités scénaristiques (la captive muette qui dessine si bien qu’on reconnait sur sa feuille un modèle précis de voiture ou tous les détails d’une vieille chapelle ? mouais… passons).
    A condition d’être indulgent, donc, le récit fait preuve d’une belle efficacité.

    Le dessin n’est pas en reste. Dans un noir et blanc harmonieusement nuancé de gris, il permet des ambiances glaçantes parfaitement adaptées au scenario. On pourrait toutefois lui reprocher un certain statisme, l’ensemble manquant un poil de dynamisme. Par ailleurs, l’aspect photographique de certaines cases est parfois très marqué. Mais globalement, le travail d’Aurélien Morinière, que je ne connaissais pas, est bon, solide et rend la lecture fort agréable.

    Bref, ce n’est pas parfait, mais c’est une bonne BD à découvrir si vous n’êtes pas rebuté par les enquêtes sordides nimbées de paranormal…

    Yovo Le 30/12/2020 à 18:25:56

    « Inhumain » est pour moi l’exemple typique de l’album frustrant. Pas raté, loin s’en faut, mais comme survolé un peu mollement de haut. Je dirais qu’il ne fait que la moitié des pages qu’il aurait fallu pour développer efficacement cette histoire.

    Dessin et scenario souffrent du même défaut : un sentiment de trop vite, de trop peu. Le background est fertile mais les personnages n’ont que peu d’épaisseur, sans personnalité ni dimension psychologique. Ce à quoi s’ajoute un character design quelconque, qui ne les rend ni attrayants, ni attachants. L’histoire est rapidement posée et emprunte quelques raccourcis qui donnent l’impression de rester constamment à la surface des choses. C’est un point commun avec le triptyque « Ter » qui m’avait interloqué exactement de la même manière.

    C’est d’autant plus dommage que le canevas est excellent. Et la variété des décors, associée à de belles perspectives et une palette de couleurs flatteuse, a réussi à me tenir en haleine et titiller mon imaginaire. Ce rythme trop rapide a au moins comme qualité de faire tourner frénétiquement les pages pour vite lire la suite et n’en rien manquer !

    En conclusion, sont-ce les auteurs, est-ce l’éditeur..? Je n’en sais rien, mais l’ensemble a manifestement été réalisé sans autre idée que divertir. De ce point de vue c’est réussi, mais pourquoi si peu d’ambition ? Il y avait une matière extrêmement riche à exploiter. Et franchement, on n’est pas passé très loin de la grande fresque spatiale qui sidère en en mettant plein la vue et questionne par sa profondeur philosophique… Mais finalement c'est un album SF de plus, sympa, mais que rien ne distingue vraiment du ventre mou de la production habituelle.

    Néanmoins, et j’insiste là-dessus, cela reste une BD de bonne facture qui contentera tout amateur de SF mainstream. Pour ma part, je ne regrette pas l'achat et la relirai avec plaisir.

    Yovo Le 30/12/2020 à 10:53:27
    Servitude - Tome 6 - Livre VI - Shalin (Seconde partie)

    Quel souffle !
    Cet ultime tome de Servitude est d’une intensité rarement vue en BD. Cela grâce au dessin vertigineux d’Éric Bourgier qui n’aura cessé de s’affiner au fil du temps : je reste admiratif devant la précision du trait et des couleurs qui viennent donner chair aux personnages, les lumières qui sculptent les décors et les visages pour en révéler les moindres détails, le dynamisme des angles de vue et la variété des cadrages qui parachèvent les cases. Une partie graphique qui frôle la perfection, donc, et happe le lecteur au cœur d’une bataille épique, en lui en faisant ressentir toute la fureur, l’héroïsme et la fatalité.

    En revanche plusieurs « trous » subsistent dans le scenario au terme de ce dernier volet. L’histoire donne l’impression de rester en partie inachevée et des questions demeureront sans réponse ou mystérieusement allusives, comme la scène des dragons par exemple, dont la beauté ténébreuse envoûte mais dont le sens reste assez flou...
    Pour autant, inachevé ne veut pas dire inabouti. Loin de brouiller la lecture, cela confère à l’ensemble une profondeur poétique inattendue.

    Cette construction atypique est une des caractéristiques de Servitude. Dès le second tome, les auteurs ont fait choix d’une narration non linéaire, chaque épisode étant dépeint comme un "tableau", au sens théâtral du terme, n’hésitant pas à rompre avec les précédents. C’est une prise de risque assumée qui force l’admiration car si cela rend la lecture plus exigeante, ces différents biais permettent aussi une immersion globale dans l’univers. Ainsi la trame emprunte de multiples détours mais ne perd jamais son fil : nous chanter la geste du Royaume des Fils de la Terre, de ses fiefs et différents peuples, à travers un seul et discret personnage, Kiriel, le maître d’arme du roi Garantiel.

    L’influence de Game of thrones, écrasante sur le 1er tome, s’est peu à peu estompée pour laisser place à une épopée dantesque, crédible, originale, baignée de noblesse et de mélancolie.

    Ce dernier tome peut donc susciter des frustrations mais la qualité de l’œuvre transcende ses imperfections. « Servitude » restera pour moi la référence en Héroic Fantasy. Et bien au-delà, une grande série tout simplement.

    Yovo Le 21/12/2020 à 21:32:55
    Les chefs-d'œuvre de Lovecraft - Tome 3 - Dans l'Abîme du temps

    Cet épisode des « Chefs d’œuvres de Lovecraft » est un peu moins fluide dans sa narration et j’avoue avoir eu plus de mal à rentrer dedans que les précédents. Mais une fois l’histoire bien lancée, c’est un régal. Gou Tanabe nous offre encore des planches de toute beauté et l’on mesure au fil de l'intrigue tout le génie précurseur de Lovecraft et l’influence évidente qu’il a pu avoir sur la culture contemporaine et la SF en particulier.

    Yovo Le 16/12/2020 à 21:31:24
    Les chefs-d'œuvre de Lovecraft - Tome 4 - La couleur tombée du ciel

    Une lecture presque perturbante. Les talents croisés de Lovecraft et Tanabe procurent un sentiment de malaise qui ne fait que croitre au fil des pages et laisse un goût tenace de tristesse et d’horreur. A partir d’un postulat très mince (la simple chute d’une étrange météorite), les 2 auteurs parviennent à dialoguer à plus de 80 années de distance pour livrer une œuvre puissante et formellement superbe.

    Yovo Le 09/12/2020 à 20:13:50
    Les chefs-d'œuvre de Lovecraft - Tome 1 - Les montagnes hallucinées - Tome 1

    Dès sa parution, « Les montagnes hallucinées » m’avait tout de suite intéressé. Mais n’étant pas trop manga, j’ai longuement hésité. La sortie des coffrets, particulièrement bien présentés, m’a convaincu de sauter le pas. C’est peu dire que je ne le regrette pas ! Avec les couvertures en simili cuir, la prise en main souple et confortable invite à tourner les pages. Ensuite, le dessin est magnifique et parfaitement adapté à ce récit à l’ancienne. Il retranscrit à merveille l’ambiance de ces aventures improbables, mélangeant sciences, mystères, horreur et mythologie. Même si l’histoire est assez peu approfondie, elle incite à l’indulgence et reste palpitante. Avec Gou Tanabe, Lovecraft a trouvé un interprète à sa mesure.

    Yovo Le 06/12/2020 à 21:27:58

    Une œuvre vraiment impressionnante, tant par la puissance de son dessin que par l’écriture, à la fois sombre et pleine d’espoir. Pourtant, ce n’est pas l’histoire en tant que tel que je retiendrai le plus (les 3/4 se passent dans une prison, entrecoupés de flash-back, flash-forwards et séquences oniriques). Même si elle demeure passionnante, ce sont surtout les non-dits qui sont les plus évocateurs. En effet, le récit est sous-tendu par de multiples thèmes comme la rédemption, la transmission, la résilience, la littérature, l’imaginaire, la fragilité des existences, la force des idées… et bien d’autres encore, subtilement imbriqués au texte et aux images.

    En résumé, une lecture fascinante, mais exigeante. Les amateurs de romans graphiques la trouveront incontournable. Pour les autres, cela pourra être fastidieux, voire hermétique.

    A noter le beau travail d’édition de Sonatine qui fait de cette BD un objet très élégant.

    Yovo Le 01/12/2020 à 20:17:13

    "Le baron" est un hommage irrésistible aux conteurs et doux affabulateurs. Truculent, inventif, cocasse, lunaire ou homérique… les qualificatifs ne manquent pas pour décrire cet album dans lequel, on le devine, Jean-Luc Masbou a mis beaucoup de passion. Je dirais qu’il est simplement généreux, quelque part entre la faconde de Pagnol et la verve de Cyrano.

    Il s’empare du Baron de Münchhausen avec une poésie graphique et littéraire délicieuse, doublée d’une grande tendresse pour son personnage, chantre de l’imaginaire et homme intègre. Il interroge le lecteur avec intelligence sur la place de la mémoire et le rôle de la légende.

    L’ensemble manque peut-être de fluidité, notamment entre chaque « souvenir » narré par le baron, mais le génial dessinateur a su déployer beaucoup de talent pour faire sienne une histoire maintes fois évoquée et nous l’offrir dans un superbe écrin, format XL et dos toilé. La place du livre est d’ailleurs prépondérante dans son récit. Pour ma part, je placerai celui-ci dans ma bibliothèque aux côtés des « Cinq conteurs de Bagdad » et de « La vierge froide et autres racontars ».

    Une très belle bande dessinée, juste et savoureuse, à mettre en toutes les mains !

    Yovo Le 26/11/2020 à 10:10:39
    Le château des Animaux - Tome 2 - Les Marguerites de l'hiver

    Ce deuxième tome est venu me confirmer que « Le château des animaux » se profile comme une série exceptionnelle. Les auteurs semblent avoir conscience du potentiel de leur œuvre et l'ont réalisée avec rigueur en étant tous deux parfaitement en phase. Non seulement la partie graphique est enchanteresse mais le récit est pleinement maitrisé. La narration, fluide et rythmée, monte crescendo au fil des pages jusqu’à la scène finale, grâce une remarquable distribution des personnages. Et chose assez rare pour être notée, une véritable émotion se dégage de certaines cases. Seule la mise en couleur un peu timide aurait peut-être mérité plus d’éclat. Mais la délicatesse des tons froids contribue aussi à retranscrire l’atmosphère glacée d’un hiver mortel.

    Au final, c’est une impression d’intelligence et de qualité qui domine l’ensemble. Impression qui perdure longtemps après avoir refermé l’album.

    Le tome 3 est d'ores et déjà l'une des sorties que j'attendrai le plus l'année prochaine.

    Je précise que j’émets cet avis sur la base de l’édition grand format qui magnifie le superbe travail de Félix Delep. Mais je suppose que l’édition ordinaire est très bien aussi.

    Yovo Le 23/11/2020 à 21:28:11
    Les petits riens de Lewis Trondheim - Tome 3 - Le bonheur inquiet

    Ce « Bonheur inquiet » n’est ni meilleur ni pire que les précédents. C’est peut-être le principal problème de cette série : les tomes sont interchangeables car l’autofiction (plus que l’autobiographie) atteint vite ses limites. L’esprit général est sympa mais la recette est toujours la même et les tribulations égocentrées du sieur Trondheim ne sont pas toujours exaltantes. Néanmoins il reste un bon observateur et un dessinateur de talent. Certaines planches sont très belles.

    Yovo Le 22/11/2020 à 19:24:39
    Les petits riens de Lewis Trondheim - Tome 2 - Le syndrome du prisonnier

    Le contenu de ce 2° tome est rigoureusement comparable au premier. Trondheim poursuit son introspection à travers ce faux journal intime rempli des petits riens de son quotidien, de ses observations et questionnements existentiels complétement débiles, qui en plus d’être assez drôles et pertinents, dévoilent parfois des traits peu avenants de son caractère. Cette (pseudo)sincérité est assez surprenante. Dans quelle mesure son avatar dessiné est-il semblable à sa personne ? Lui seul le sait.

    Yovo Le 22/11/2020 à 19:20:50
    Les petits riens de Lewis Trondheim - Tome 1 - La malédiction du parapluie

    Il n’y a pas tromperie sur la marchandise, ce premier tome donne rapidement le ton : comme son titre l’indique, ce petit livre est rempli de riens, au pluriel. Trondheim nous y raconte sa vie d’auteur de BD jour après jour. On adhère ou pas à l’exercice, forcément nombriliste. Mais force est de constater qu’au-delà de sa petite personne, dépeinte comme toujours sous les traits d’une sorte de cacatoès, cela se révèle souvent intéressant, parfois drôle et teinté d’une autodérision inattendue quand il fait de ses angoisses et névroses le sujet de ses gags, en exposant ainsi son personnage aux jugements.

    Yovo Le 22/11/2020 à 19:17:28
    Pico Bogue - Tome 12 - Inséparables

    J’ai beaucoup d'affection pour Pico Bogue. C’est la seule série humoristique contemporaine que je collectionne. Car bien sûr ce n’est pas que drôle. C’est surtout intelligent, plein de tendresse et habité par une poésie savoureuse.

    Certes, ce tome 12 n’est pas le meilleur, mais il contient comme chacun des albums son petit lot de perles. Les couleurs et décors d’Alexis Dormal sont toujours aussi doux et ses bouilles irrésistibles. Dominique Roques, sa maman, continue pour sa part d’inventer des situations invraisemblables juste pour le plaisir de placer un bon mot. C’est parfois tiré par les cheveux, alambiqué et redondant mais je pardonne aisément ces travers, car ce mélange d’érudition littéraire et de canaillerie est justement l’une des marques de fabrique des aventures de ce petit bonhomme si attachant.

    J’avoue que je suis surpris de le retrouver en sélection officielle à Angoulême cette année mais cela me semble amplement mérité ! A découvrir absolument pour ceux qui ne connaitraient pas encore.

    Yovo Le 22/11/2020 à 18:59:03
    L'Âge d'or - Tome 2 - Volume 2

    Ce volume 2, qui se passe des années après le premier, donne au diptyque une tonalité beaucoup plus sombre.

    Bizarrement, le récit est exclusivement consacré au siège du château royal que Tilda, la sœur déchue du roi, assaille avec ses troupes. Et le combat est âpre, voire désespéré. Les différents protagonistes, imprégnés de cette atmosphère oppressante, en sont bien moins attachants. Et par ce biais, c’est toute l'histoire qui a malheureusement perdu de son foisonnement et de son ampleur. Aucun personnage nouveau ne vient non plus enrichir le casting. Sur un plan narratif, c’est donc une vraie déception.

    Mais si le travail d’écriture de Roxane Moreil déconcerte, il a aussi le mérite de surprendre. Et la dimension politique que revêt son scenario en nous livrant le vrai sens de cette fable résonne de façon familière : le pouvoir corrompt, aimante, pourrit, ravage tous ceux qui le convoitent. Il imbibe les âmes et dessèche les cœurs. Même si ce n'est guère nouveau et qu'on le savait déjà...

    "L’ Âge d’or" rejoint ainsi les grandes fresques qui l’ont précédé, du Seigneur des Anneaux à La quête de l’Oiseau du Temps en passant par Star Wars. Sur le fond ce n’est donc pas très original. Mais pour la forme, Cyril Pedrosa et ses coloristes élèvent l’ensemble au rang de monument de la BD par la qualité étincelante du dessin, des lumières et de la mise en page.

    On n’a pas fini, je crois, d’entendre parler de L’ Âge d’or grâce à ce graphisme inspirant, inventif et brillant qui restera dans les annales.

    5/5 pour le premier
    3,5/5 pour le second

    Yovo Le 31/10/2020 à 12:43:32

    Avec « Moments extraordinaires sous faux applaudissements » (quel titre !) Gipi signe un livre remarquable d’intelligence et de franchise, dont la maitrise narrative force l’admiration.

    L’écriture, très simple mais acérée, fait écho au dessin protéiforme qui se joue des codes et exploite toutes les possibilités offertes par la bande dessinée. Au final, cette œuvre autobiographique, introspective et troublante a, pour le lecteur à la mi-quarantaine que je suis, quelque chose d’universel et d’évident. Ou plutôt, elle sait dire avec une justesse frappante de ces évidences enfouies que l’on connait intimement mais qu’on ne peut décrypter… Et elle distille une émotion vitale, sans filtre, à fleur de peau.
    Un roman graphique brillant ; à lire absolument.

    Yovo Le 30/10/2020 à 17:26:49

    Cela faisait des années que je n’avais pas relu Koma. Et je me suis replongé dans mon intégrale N&B avec un rare plaisir, toujours émerveillé par la fantaisie, l’intelligence, la tendresse et la gravité dont a fait preuve Frederik Peeters pour créer son œuvre.

    Il y a du Miyazaki derrière cette poésie burlesque et horrifique qui aborde avec la même malice que le maître japonais des thèmes comme le deuil et la maladie. Koma est donc un merveilleux hommage à l’enfance et son pouvoir de résilience, seul rempart contre la bêtise dévastatrice des adultes. Car à la fin ce sont eux, les enfants, qui réinventent le monde.

    Yovo Le 18/10/2020 à 19:34:02
    La bête (Frank Pé/Zidrou) - Tome 1 - Tome 1

    Le graphisme de Franck Pé est en tous points remarquable et fait de « La bête » un album absolument splendide. La générosité du dessin, sa précision et ses couleurs permettent de s’absorber de longues minutes dans chaque planche. Et l’impeccable travail d’édition de Dupuis (format carré, papier épais) rajoute encore une dimension à la beauté de l’objet.

    Concernant le récit, après l’époustouflante séquence d’introduction, je m’attendais à ce que le scénario de Zidrou soit beaucoup plus sombre. A titre personnel je me réjouissais d’avance de découvrir le Marsupilami dans un rôle plus réaliste, tel un cryptide sauvage et inconnu échappé de sa forêt, semant la panique à Bruxelles. Mais au final, petite déception, l’histoire est traitée très simplement à travers le regard d’un enfant innocent et rêveur. Ce qui apporte une certaine ingénuité à l’ensemble, très éloignée de ce que laissait présager l’ouverture cauchemardesque. Cela dit, le ton trouve rapidement son équilibre. L’humanisme des personnages, les scènes d’action ponctuées de nombreuses touches d’humour et de références, le tout magnifié par la maestria de Franck Pé, procurent un incontestable plaisir de lecture. Pari réussi, c’est une BD superbe dont j’attends la suite avec impatience !

    Yovo Le 07/10/2020 à 21:12:04
    Les 5 Terres - Tome 4 - « La Même Férocité »

    Chaque volume des « 5 Terres » se distingue par une écriture particulièrement soignée. Le vocabulaire est toujours fin, les tournures élaborées et chaque phrase est porteuse de sens. Confier le scénario à un trio d’auteurs était donc une excellente idée et porte ses fruits.

    Le rythme frénétique de 3 albums par an laissait craindre que ce soit une de ces énièmes productions low cost, pensée pour la rentabilité et le court terme. Mais non. Contre toute attente, l’ensemble est intelligent, nuancé et fonctionne à la perfection.

    Les auteurs prennent leur temps pour développer des intrigues de palais assez complexes, alors que la voie – facile – de l’action était toute désignée pour une épopée d’héroic fantasy, fût-elle animalière. Ils assument ainsi le risque de perdre certains lecteurs, plus avides de guéguerres et de champs de bataille que de ces longues séquences de dialogues. Mais celles-ci, en révélant très habilement de savants mécanismes de manipulation politique, font tout l’intérêt de cette série, qui s’adresse finalement à un public beaucoup plus mature que je ne l’imaginais au début.

    Ce 1er cycle fera date, c’est certain. A lire sans attendre.

    Yovo Le 03/10/2020 à 16:13:59
    Bella ciao - Tome 1 - (Uno)

    De Baru, auteur solide et singulier, j’avais lu et aimé « Pauvres zhéros » et « L’enragé ». N’ayant aucun de ses titres dans ma bibliothèque, j’ai vu avec 'Bella Ciao' l’occasion de pallier cette lacune. Je l’ai donc acheté sans hésiter, alléché par le bandeau vantant « le grand œuvre » du Grand Prix d’Angoulême 2010.

    Hélas, je suis passé complètement à côté. C’est d’autant plus dommage que je devine cet album bourré de qualités. Mais étrangement je n’y ai vu que des défauts, probablement parce que j’en attendais autre chose.

    En fait, comme le titre et la couverture le suggère, j’espérais une fresque historique narrant l’immigration italienne et l’avènement de « Bella ciao », ce chant partisan emblématique, remis au goût du jour ces dernières années par des manifestantes du monde entier et une série télé. Au lieu de cela, je n’ai trouvé dans ces pages que 4 histoires plus ou moins indépendantes et assez inégales dans le fond comme dans la forme, toutes très éloignées de ce que j’imaginais…

    Le découpage et le dessin des personnages m’ont semblé complètement illisibles, notamment pour le 1er chapitre, décrivant le massacre gratuit d’immigrés italiens à Aigues-Mortes en 1893. L’épisode est certes édifiant, mais incapable de m’y retrouver dans l’action et les différents protagonistes, je n’y ai rien compris. Idem pour le 2ème chapitre, plus autobiographique, qui nous entraine au cœur d’un repas de famille dans les années 70. Malgré l’analyse érudite de la fameuse chanson, je suis resté complètement extérieur à la scène, sans arriver à m’intéresser aux débats ni savoir qui était qui. Le ton du 3ème m’a semblé décalé et l’épaisse documentation jointe plutôt fastidieuse. Le 4ème et dernier, évoquant Mussolini et le fascisme, est assez pertinent mais il demeure trop anecdotique puisqu’il s’agit en réalité d’une recette de cuisine…

    En définitive, je crois comprendre l’aspect intime de l’ouvrage, cette plongée dans la mémoire familiale, le besoin d’y puiser des ressources, d’en collecter des fragments pour la reconstituer et retracer son parcours, retranscrire les évènements avant qu’ils ne s’effacent, remettre les bonnes personnes à leurs vraies places, leur rendre hommage. Cette mise en perspective de leur histoire est salutaire, voire nécessaire mais quelque chose a fait que sous cette forme-là, je n’y ai pas adhéré et ne me suis pas du tout senti concerné par le travail pourtant impressionnant qu’a fourni Baru. Je n’en ai ressenti ni l’émotion ni la nostalgie.

    « Bella ciao » est annoncé comme une trilogie mais à ce stade, je ne suis pas sûr de poursuivre sur les 2 prochains tomes. Je pense tout simplement que ce récit n’est pas fait pour moi.
    Mais s’il ne m’a pas convaincu, j’encourage quand même à le lire pour se faire son idée.

    Yovo Le 23/09/2020 à 19:14:37
    Stern - Tome 4 - Tout n'est qu'illusion

    Avec « Tout n’est qu’illusion » les frères Maffre nous entrainent encore vers l’inattendu. Maitrisant parfaitement l’univers qu’ils ont construit, ils prouvent leur capacité à nous surprendre à tous les coups. Je salue cette prise de risque et ces détours imprévisibles d'album en album, même si le scénario de ce 4° tome n’est pas le meilleur.
    En revanche le dessin est toujours aussi bon. Le trait peut paraitre un peu moins précis mais il est renforcé de couleurs aquarellées plus brutes, plus denses qui créent de superbes atmosphères.

    Échoué à la Nouvelle-Orléans, Elijah Stern va cette fois se confronter à de bizarroïdes personnages entre deux potions vaudou. On peut éventuellement regretter que l’ambiance western soit ici totalement délaissée, la poussière du Kansas étant remplacée par la touffeur saumâtre de la Louisiane. Ce changement radical d’acteurs et de décor va désorienter des lecteurs mais il permet de renouveler le terreau de ces aventures et d’élargir d’autant le champ des possibilités pour la suite.

    Puisse Stern promener encore longtemps sa silhouette malingre et son regard mélancolique dans un Ouest décalé qui se réinvente continuellement au fil de cette formidable série grâce au talent des Maffre Brothers !

    Yovo Le 20/09/2020 à 12:08:21
    RIP - Tome 3 - Ahmed - Au bon endroit au mauvais moment

    L’univers horriblement morbide développé par RIP était déjà génial et justifiait à lui seul la lecture. Mais la dimension de thriller qui se greffe dessus tome après tome en fait une série d’une efficacité diabolique. Tout est imbriqué et se recoupe depuis la 1ère page du 1er album. Chaque rouage s’ajuste au millimètre et met en branle une mécanique monstre dont aucun détail n’est jamais laissé au hasard. Gaet’s fait preuve d’une intelligence et d'une habileté redoutable au scenario. Il livre un bijou d’écriture dont la construction, complexe et multidirectionnelle, est aussi parfaitement huilée que brillamment dessinée et mise en page par Monier. Le casting est impec, l’ensemble est fluide, immédiatement identifiable, et ne perd jamais le lecteur qui n’a plus qu’à jubiler devant un tel chef d’œuvre de cynisme !

    Une série probablement unique dans le paysage de la Bande Dessinée. Déjà culte ?

    Yovo Le 13/09/2020 à 11:56:05
    Gentlemind - Tome 1 - Gentlemind - Épisode 1

    « Gentlemind » se distingue d'abord par une grande liberté formelle : le découpage en cases très variées (sans cadres, rondes, étroites, pleine pages…), les couleurs fanées - parfois parsemées d’éclats plus vifs - et les textures tramées donnent une atmosphère vintage et une énergie folle à cet album.
    Le dessin anguleux et chargé peut sembler brouillon mais il est parfaitement maitrisé. Les lumières travaillées à l’aquarelle lui apportent profondeur et vivacité. C’est vraiment très beau.

    Et c’est aussi par le scenario que brille « Gentlemind ». Il faut être attentif car l'ensemble est dense, mais l'écriture est précise et ciselée. Ne vous fiez pas à la preview ; passées les 1ères pages un peu déroutantes, le récit est porté par des personnages charismatiques et touchants qui gagnent en intensité au fil des pages.

    Franchement je n’aurais jamais pensé que la simple histoire d’un magazine puisse autant me passionner… Il faut dire que le contexte historique (1940), les relations complexes entre les protagonistes et les enjeux qui se dessinent au fur et à mesure nimbent ce 1er tome d’émotions inattendues et le hissent au dessus du lot.

    Une excellente BD, très originale, intelligente et particulièrement bien réalisée. Bravo !
    A lire absolument.

    Yovo Le 11/09/2020 à 21:50:23
    Terre - Tome 1 - Le vieux monde

    Un 2ème cycle qui démarre assez bien sur le plan visuel. Le dessin, intemporel et élégant, met bien en valeur les volumes par sa technique de stries et apporte une indéniable plus-value à cet album.

    Le scenario n’est malheureusement pas à la hauteur. Il n’est pas désagréable mais rien ne vient lui apporter une quelconque profondeur. Les tribulations de Mandor et Beth partant à la découverte de cette étrange planète Terre semblent non liées et plus ou moins gratuites… Aucun fil narratif ne les inscrit dans une logique ni sur des bases solides. On ne ressent absolument pas l’impératif de survie par exemple.
    Rodolphe, qui apparemment ne sait toujours pas comment donner du corps à ses personnages, les fait divaguer au hasard en puisant sa timide inspiration chez son confrère Léo, scènes d’amour comprises. Le cahier graphique à la fin en est un bon exemple : en trois petites phrases il nous en apprend beaucoup plus sur les protagonistes que l’histoire elle-même. C’est dire le peu de considération que le scénariste accorde à son casting.

    En conclusion c’est plutôt une BD sympa, restons objectif, mais on est effectivement loin de la qualité de « Ter », qui comportait pourtant déjà de grosses lacunes scénaristiques.

    Yovo Le 07/09/2020 à 07:14:14

    L’ébullition qu’il y a eu autour de « Carbone & Silicium » avant même sa sortie témoigne de l’attente que suscite le jeune prodige Mathieu Bablet. Pour preuve, les 2500 exemplaires du tirage limité sont partis en 2-3 jours. Du coup, je suis bien heureux d’avoir le mien !

    Et ce nouvel album est un véritable chef d’œuvre, je n’ai pas d’autre mot. Rien qu’imaginer la somme astronomique de travail que représentent ces 250 planches donne le vertige ! Ses perspectives hallucinantes, ses lumières éthérées, ses personnages biscornus, sa profondeur métaphysique en font une œuvre hypnotisante, puissamment mélancolique, en tous points magnifique.

    Bien évidemment, si vous faites partie de ceux qui ont descendu « Shangri-La », ne prenez même pas la peine de le feuilleter, ce n’est clairement pas fait pour vous.

    En tout cas « Carbone & Silicium » confirme M. Bablet comme l’auteur le plus doué de sa génération et je ne l’imagine pas repartir bredouille du prochain Angoulême…

    Yovo Le 29/08/2020 à 13:11:27

    [:: SPOILERS ::]

    Qu’il est dur de confirmer après un 1er titre réussi ! Lucas Harari, comme tant d’autres avant lui, aura buté sur cet écueil… Après « L’aimant », album à la force incroyable, j’avoue que j'espérais mieux de « La dernière Rose de l’été ».

    Harari a su créer une superbe ambiance mais n’arrive pas à la maintenir sur la durée. Et le rythme en pâtit. Les 100 premières pages se lisent très rapidement (trop rapidement?) et se passent sans évènement majeur avant que la sauce ne prenne enfin. Mais les 30 dernières pages basculent plus ou moins dans le thriller, ce qui n’était pas le mode narratif employé jusque-là. On sent alors qu’il est moins à l’aise graphiquement, son trait n’étant guère adapté à l’action. Et scénaristiquement, ce passage est aussi moins crédible.

    Si visuellement l’ensemble est splendide avec cet encrage contrasté et ces couleurs éclatantes légèrement texturées, le récit pêche un peu par mollesse et manque d’acuité. Il y a pourtant de très bons personnages, un décor parfait, une ambiance idéale. Les ingrédients rêvés pour une histoire prenante ! Sauf qu'il n’y a pas vraiment d’histoire. On a plus l'impression d'un simple fait divers auquel le héros, falot, participerait de loin et malgré lui. Le dénouement n’apporte pas les réponses attendues et on ne sait pas ce qu’il advient des protagonistes : le docteur, Rose, le cousin... Les autres jeunes, aussi, qui auraient pu servir de contrepoint ne font que de la figuration. Et l’inspecteur ne clôt même pas son enquête.

    Par ailleurs l’auteur fait une fixette sur « Martin Eden » de Jack London qui revient du début à la fin. Je connais mal ce livre, je n’ai donc pas forcément saisi les références ni su s’il y avait un intérêt à avoir focalisé ainsi sur ce roman.

    A côté de ça, les dialogues sont très bien écrits. Ils fourmillent de petites bizarreries subtiles qui résonnent comme des indices à déchiffrer. C’est là qu’est le talent immense de cet auteur. Il n’a pas son pareil pour instiller un climat mystérieux, des personnages qui se toisent et se tournent autour, du silence, une violence indistincte et contenue, une forme de psychose contagieuse, un background esthétique et distingué qui flirte avec le fantastique. Ses planches ont toujours une étrangeté inquiétante et vibrent d’une menace invisible et pesante. La magnifique couverture en témoigne. Cela me fait penser au films de Dominik Moll ("Harry, un ami qui vous veut du bien", "Lemming"…) ou "Swimming pool" de F. Ozon.

    Tous ces éléments sont bien présents dans « La dernière Rose de l’été » mais sont comme éparpillés au hasard, sans être au service d’une intrigue qui se resserrerait, révèlerait des choses cachées et ferait sens. C’est plutôt le contraire. La trame de l’histoire est assez ténue et n’aboutit nulle part. Pas même à l’éclosion du personnage principal, Léo, comme écrivain. Je m’attendais à découvrir sa littérature à la fin mais rien, pas une page, pas une phrase. Pas de mise en abîme non plus comme dans l’épilogue magistral de « L’aimant », ni rebondissement, ni fausse piste, pas plus qu’un rôle quelconque joué par la collection d’art ou l’architecture de la villa… bref, rien qui donnerait corps à l’histoire. Ici, tout semble survolé de haut, sans enjeu clair. Et toutes les petites anomalies aperçues ici ou là, tous les personnages un peu étranges glissés habilement au fil des planches (le maçon, le voisin, le chat…) ne servent finalement à rien.

    Je suis un peu sévère mais je suis frustré car je n’avais pas envie d’être déçu par cet auteur auquel je crois. Je me rends compte que j’en attendais sans doute trop. Objectivement cela reste un bon album, superbement dessiné et mis en couleur, particulièrement bien édité par Sarbacane (format XL, dos toilé, papier épais). Et je continuerai évidemment à suivre sans hésiter Lucas Harari dans ses prochaines publications. En attendant je vous invite à vous précipiter sur « L’aimant » si vous êtes passé à côté et à laisser votre curiosité se piquer à cette dernière Rose de l'été.

    Yovo Le 28/08/2020 à 21:18:33

    Un très bel album qui baigne dans une ambiance visuelle splendide. Avec une maitrise graphique admirable, Tiburce Oger varie les angles et offre à ses décors une lumière et une palette de couleurs extraordinaires. Il fait étinceler la neige et enflamme le ciel comme jamais. Les pleines pages en sont renversantes !

    Si j’insiste sur l’atmosphère c’est que ce n’est pas une BD d’action. Ceux qui recherchent un western épique, des chevauchées sauvages, des duels à mort ou des attaques de diligences risquent d’être déçus. Ghost kid est une longue et lente errance, du Dakota du nord au Mexique, emplie de digressions, de scènes intimistes et de détails imperceptibles. Cela confère à cet album une identité très singulière et, pour ma part, inoubliable !

    J’ai vraiment aimé, même s’il ne s’y passe pas grand-chose et que le scenario aurait pu être plus complexe. Personnellement, j’aurais souhaité revoir Meredith, la patronne du ranch par exemple… mais j’accepte ce choix assumé d’un scenario qui déjoue les attentes et propose une autre partition. C’est ce que fait Jim Jarmusch au cinéma et que réussit très bien T. Oger ici. Pour illustrer cette idée, le clin d'oeil à Undertaker (p.28/29) est un passage savoureux ! Le vieux cow-boy rhumatisant qui enterre le ténébreux croque-mort peut se lire comme la BD d’auteur surclassant la série commerciale... Une petite pique fort sympathique !

    Voici donc une belle parution, sensible et intelligemment orchestrée, qui témoigne elle aussi de la santé éblouissante du western ces dernières années. A découvrir absolument !

    Yovo Le 26/08/2020 à 20:33:47
    Le roy des Ribauds - Tome 3 - Livre III

    La couverture somptueuse donne le ton. Quand les bas-fonds de Paris s’agitent, ça saigne !..
    J'adore la légère exagération du dessin, parfaitement dosée.
    Une saga médiévale absolument géniale !

    Yovo Le 22/08/2020 à 11:50:25
    Le viandier de Polpette - Tome 1 - L'ail des ours

    Cette série est vraisemblablement abandonnée et c’est bien dommage ! L’histoire est toute simple mais pleine de drôlerie et de tendresse. Une fable gastronomique et poétique en forme de récit d’apprentissage.

    Le cadre est bien trouvé : un petit château abritant une auberge, perdu au fond des bois, dans lequel vit en exil le jeune comte de la contrée, seul depuis son enfance avec une poignée d’habitants. L’improbable époque médiévalo-industrielle aux anachronismes savoureux rajoute à son attrait. Le ton résolument optimiste a cette capacité rare à mettre le lecteur de bonne humeur. Les décors pittoresques et les personnages aux caractères bien trempés, ajoutés aux nombreuses et alléchantes recettes illustrées qui garnissent les pages, garantissent un irrésistible plaisir de lecture.

    Une BD tout public, facile à lire et revigorante. Si vous tombez dessus dans une brocante, n’hésitez surtout pas car ce 1er et unique tome peut heureusement se lire comme un one-shot. Vraiment sympa !

    Yovo Le 20/08/2020 à 10:57:16
    La déconfiture - Tome 2 - [Seconde Partie]

    De par ses dialogues travaillés, sa poignée de personnages, ses phases d'action circonscrites à des décors très simples, « La déconfiture » pourrait être facilement adapté au théâtre. Et cela donnerait probablement une pièce intelligente et cinglante.

    Rabaté livre une vision crue de la défaite en se glissant au milieu de ses semblables. Des gens normaux devenus soldats, puis prisonniers, sans vraiment comprendre pourquoi.
    Ici, pas de champ d’honneur ni bataille en cinémascope ; pas d’état-major ; pas de romantisme guerrier, de sacrifice héroïque ou d’esthétisation de la violence ; pas d’envolées nationalistes ni pamphlets libertaires ; pas plus de morale, de justice ou de leçon. C’est cela la déconfiture. Ce n’est pas que la défaite d’une nation, c’est surtout la défaite de l’âme humaine. Sans décorum.

    A travers son personnage d'Amédée, un homme certes ordinaire mais instruit, déterminé, perspicace et posé, Rabaté questionne notre humanité. Si ses convictions à lui vacillent et qu’il ne peut s’en sortir sans piétiner ses valeurs, y serions-nous parvenus nous-même ? A chacun sa réponse...

    Un diptyque édifiant aux dessins superbes. A lire absolument.

    Yovo Le 20/08/2020 à 10:54:11
    La déconfiture - Tome 1 - [Première Partie]

    La déroute française de juin 40 vue par un biffin lambda parmi des milliers d’autres.
    Un récit écrit à hauteur d’homme, d’autant plus frappant qu’il est simple, épuré, laissant tout sensationnalisme de côté. Comment mieux décrire la défaite qu’en illustrant cette déconfiture avec l’économie dont fait preuve Rabaté ? Un décor quasi unique et bien documenté, des anecdotes, un rythme imprévisible, un trait juste et réaliste : la guerre comme si vous y étiez. Très bel album.