Quatre couleurs
Une BD de Blaise Guinin - Vraoum ! - 2014
Changer de vie comme on change de couleurs. Grégoire et Pierre sont deux amis étudiants qui, le temps d’un cours, échangentleur identité pour améliorer leurs moyennes dans les matières que chacun des deux maîtrise. En suivant les cours dans la fac de l’autre, ils y rencontrent quatre femmes, sous le signe des quatres couleurs du bic du même nom. Noir pour Chloé de Jais, l’ex du cynique Grégoire, qu’il a traumatisé sans mêmesans rendre compte, Vert comme les lunettes de sa troublante enseignante, Rouge comme la cheveleure de Mathilde dont Pierre... Lire la suite








Grégoire est un sale con. Il l’était déjà, il l’est et le restera. Et autour de lui gravite des personnages qui portent tous des ombres. Chloé, par exemple, sait que Grégoire est le pire des cons mais ne veut pas y croire (car son existence de femme aurait débuté par un mensonge et, de cela, elle ne peut s’y résoudre). Pierre accepte un marché par lâcheté (il ne sait pas dire non) Et d’autres personnages tournent autour de lui qui savent vexer, voire même humilier. Reste une rouquine qui, elle, sera la probité à tout épreuve (la valeur étalon de toutes ces sinuosités de vie malodorantes)
Et l’histoire se clôturera par une tragédie.
Blaise Guinin nous offre une narration qui semble linéaire mais qui ne l’est pas, qui semble conceptuel (dessiner tout l’album avec un stylo 4 couleurs) et qui l’est certes mais qui est surtout d’une humanité de tous les jours, d’un entremêlement humain des sentiments quotidiens.
Il structure son propos par des objets des couleurs mais tout cela n’est que prétexte. Il y a beaucoup de force dans la narration, il y a beaucoup de tension. Que le titre soit à la fois la manière de dessiner et de colorier ainsi que le fusil de Tchekhov essentiel au dénouement est déjà très fort. Mais que les rapports humains entre les personnages soient si palpables est une réussite.
Surtout que la colonne vertébrale de la narration est un sale con. On est dans sa tête, dans ses fantasmes (et les planches de nues sont d’un érotisme superbe et pervers), et dans ce « je-m’en-foutisme » sidéral et agressif.
Les dessins racontent l’histoire sans chichi ni tralala. Ils sont maitrisés et inventifs.
J’ai adoré
On se rappelle tous de ce fameux stylo où l'on pouvait choisir quatre couleurs à savoir le noir, le bleu, le vert et le rouge.
Noir comme le téléphone portable.
Bleu comme le fond de la piscine municipale.
Vert comme le délicieux regard de la prof.
Rouge comme le sang de cette étudiante qui se serait jetée du 6ème étage de la faculté.
Nous suivons un jeune étudiant du nom de Grégoire qui flambe ses études et son avenir sans être capable de prendre sa vie en main, qui passe ses soirées à boire et ses journées à cuver. Pitoyable et pas original. Il est juste à l'image de la société qui l'a engrangé : vide et sans valeur.
Quatre couleurs est une véritable surprise malgré un graphisme assez minimaliste se basant sur les traits hachés de ces quatre couleurs. C'est superbement bien orchestré jusqu'à un final époustouflant. Cela fait partie de ces découvertes au gré de lecture pas forcément voulue. Cette oeuvre millimétrée et très subtile mérite toute notre attention. Une bonne idée qui a été exploitée pour le meilleur.